Pam Méliee est une photographe féministe et queer basée à Paris. Sa nouvelle exposition photo a lieu du lundi 17 avril au mercredi 17 mai 2023 au Centre Paris Anim Montparnasse (75014) dans le cadre du Festival « Fais pas genre ». L’exposition intitulée « Créatures Kings » rassemble des portraits d’artistes drag kings et queers, qui vous plongent dans l’univers burlesque, festif, poétique et engagé de leurs performances. La dizaine d’artistes photographié·es proposeronnt aussi un spectacle le vendredi 21 avril à 20h au Centre Anim Montparnasse pour immerger complètement le public dans l’univers du drag king ! On a posé quelques questions à Pam Méliee pour en savoir plus.
Peux-tu te présenter et peux-tu nous parler de ton parcours ?
Pam Méliee : Salut Friction ! Je m’appelle Pam, je suis photographe professionnelle spécialisée en portraits et évènements. Je suis née et j’ai grandi à Paris 13e. Je pratique la photographie depuis l’adolescence. Je me souviens que j’étais déjà émerveillée par le portrait à l’époque ! Je menais deux séries principales sur l’androgynie et le dandysme, dont se dégageait une vision mélancolique, mais aussi engagée et poétique de l’adolescence. Comme j’étais très réservée à l’époque, je considérais aussi l’appareil photo comme un moyen extraordinaire de provoquer des rencontres et d’immortaliser des artistes que j’admirais.
Durant la pandémie, j’ai arrêté mon travail d’enseignante pour me concentrer pleinement sur la photographie. J’ai fait une reconversion professionnelle à l’Ecole des Gobelins et j’ai monté mon entreprise. J’ai une approche créative, bienveillante et empouvoirante car je considère la photo à la fois comme un art visuel et un outil de développement personnel. J’ai envie que les personnes que je photographie puissent porter un regard bienveillant sur elles et leurs corps.
A côté de mon activité photographique, j’ai fondé le média queer Le Castor Magazine en 2014, ainsi que les projets musicaux Versinthë99 (queer-punk) et Lendemains Versinthés (indie-folk).
Parle-nous de ton exposition. Quelle en est la genèse ?
Pam Méliee : Lorsque j’étais à l’Ecole des Gobelins, nous avions des sujets de reportages libres. J’avais choisi d’axer l’un des miens sur une performance de l’artiste Cybrid des Fluides. Ce show (que je raconte ici) m’a bouleversé. C’est à partir de ce moment que j’ai vraiment mis les pieds dans les cabarets parisiens, qui m’émerveillent par leurs aspects burlesques, festifs, poétiques et subversifs. Depuis la création de Versinthë99 en 2017, je me suis beaucoup épanouie dans les cultures punk-rock, queer et DIY. En rencontrant des artistes de cabaret, je me suis aperçue que nous avions de nombreux points communs. Mais celleux qui me prenaient systématiquement aux tripes étaient les artistes drag ! Le drag offre un espace incroyable d’expérimentation par le corps et de déconstruction des genres. C’est un art qui cherche à faire passer des messages poétiques et politiques, comiques, légers, intimes… Les artistes touchent à énormément de disciplines pour construire leurs narrations : story-telling, composition musicale, maquillage, coiffure, vêtements, art scénique… Ce qui est juste incroyable à vivre et à photographier !
Cette expo photo est la suite logique de mes séries sur les cabarets parisiens. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas de photos de spectacles. Cette série a pour vocation de figer en conditions « studio » la genèse des performances que vous découvrirez lors d’un spectacle inédit le Vendredi 21 avril 2023 au Centre Paris Anim Montparnasse. Mon idée était que la photo ne soit pas une trace d’un événement live et la virtualisation d’une performance, mais l’inverse ! En résulte cette série un peu hybride entre photo créative, script et image de documentation.
Pourquoi est-il important de visibiliser le travail des drag kings ? Que penses-tu de leur visibilité croissante aujourd’hui ? Est-ce qu’il y a une meilleure reconnaissance de leur art ?
Pam Méliee : Cette série photo a pour objectif de mettre en lumière le monde drag king, encore méconnu et invisibilisé sur la scène drag. Il s’agit notamment de montrer une communauté dans son existence, sa flamboyance et son empowerment collectif.
La série a été réalisée en collaboration avec la Kings Factory, une association qui organise des évènements (spectacles, ateliers, conférences… ) afin de permettre aux artistes queer de se produire dans des espaces inclusifs, artistiques, festifs et engagés. C’est grâce à des actions comme celles que la Kings Factory mène depuis 2014 que de plus en plus de personnes osent se lancer et faire leurs premiers pas dans cette discipline. Souvent quand je photographie des shows, je fais la connaissance de « bébés kings » dans le public en train de créer leur drag et tâter le terrain. Quand je les retrouve peu de temps après sur scène, cela me donne toujours des frissons ! C’est un milieu où les personnes s’encouragent énormément les unes les autres à passer à l’action, et je trouve ça formidable.
Pourtant, les drags kings n’ont pas l’accueil et la visibilité qu’ils méritent. Alors que la popularité et le nombre de drag queens explose (notamment avec le succès de l’émission de téléréalité américaine RuPaul’s Drag Race), les drag kings peinent à se faire une place et n’ont pas autant de pouvoir pour organiser des évènements. Ils souffrent notamment d’un manque de moyens pour se visibiliser et ont moins de bookings que les queens. C’est là que de mon côté la photo entre en jeu et peut devenir un mode d’action privilégié pour participer à cette quête de visibilité.
Cybrid des Fluides : La visibilité pour moi est à la fois une bonne et une mauvaise chose. D’un côté ça permet de démocratiser, normaliser, rendre visible, mais d’un autre côté ça nous rend aussi vulnérables par la hausse de violences et réactions négatives. Les queens sont de plus en plus visibles, mais la visibilité traîne pour les kings… On est encore loin, cela dit je sens que depuis la fin du confinement il y a eu un boum de kings et d’événements, et donc de visibilité en quelque sorte : nous commençons à être de plus en plus présents dans les espaces de queens aussi (même si malheureusement on fait face à beaucoup de tokenisme, instrumentalisation et fausse inclusion). Mais globalement les kings ne sont pas assez reconnus, ni réellement compris.
Vendredi 21 avril, il y aura aussi un show drag. Peux-tu nous en dire plus ?
Pam Méliee : J’ai beaucoup trop hâte d’être vendredi ! A 20 heures, les photos prendront vie et s’animeront sous vos yeux ! Au programme, une bonne palette de kings : Jay des Adelphes, Natrix, Cybrid des Fluides, Daisy Lusion, Cyber Prince, Apollon d’Angelo, Le Faux Bourdon, ou encore Peter Cock. Surprises assurées ! Si vous voulez en savoir plus… vous savez ce qu’il vous reste à faire !
L’entrée est à prix libre et l’ouverture des portes est prévue à 19h.
Pour venir au Centre Paris Anim Montparnasse, il suffit de suivre la licorne : https://www.yiny.org/w/ix5L9yZgcma5j6UMCGqZyz ou les explications suivantes : dans la Gare Montparnasse, se rendre à la voie n°3 des grandes lignes SNCF. Monter tout en haut de l’escalier à gauche de la voie 3 / devant la boutique SNCF jusqu’au Jardin Atlantique. Le centre est en diagonale sur la droite.
L’expo est ouverte du 17 avril au 17 mai. En semaine, le Centre est accessible du lundi au vendredi de 9h30 à 19h, et le samedi de 10h à 18h.