« Je fais tout le temps de la musique et il y a des choses qui sortent ou pas. Je fais beaucoup de collaboration, dans d’autres arts, par exemple avec le cinéma ou pour des spectacles de danse. J’avais envie de me recentrer un peu et de revenir à l’essence même de ce que je fais depuis le début : je suis DJ, je joue dans des clubs et j’avais envie de me recentrer vers ma colonne vertébrale. » C’est en ces termes que CHLOÉ explique la genèse de son nouvel EP qui sortira le 25 octobre prochain.
CHLOÉ est une artiste très complète qui a fait ses preuves en tant que figure de proue de la musique électronique française, comme l’a rappelé sa participation au show de clôture des jeux paralympiques le 8 septembre dernier, artiste prolifique, on lui a demandé comment ces différentes facettes de sa carrière s’articulaient : « Comme c’est toujours moi qui le fais, c’est pas non plus le grand écart, je reste dans ma zone, dans ce que je sais faire. Depuis mon premier EP en 2002, j’ai toujours exploré à la fois la musique club mais aussi des sonorités plus lentes. » Et effectivement, dès Erosoft, son premier EP, un titre comme « Paradise » explorait des atmosphères plus calmes grâce aux sonorités de la guitare. Avant de devenir DJ, CHLOÉ composait de la musique en expérimentant sur des 4 pistes, avec des guitares et des voix. : « Quand j’ai commencé à comprendre comment on faisait un morceau de club, je me suis dit que je voulais faire la même chose qu’avec un 4 pistes mais en utilisant les outils de la musique électronique. J’aime mélanger d’où viennent les sons. »
Pour comprendre comment la DJ en est arrivée à ce nouvel opus, on a voulu discuter avec elle de l’évolution de sa musique mais aussi de sa place dans la scène musicale française. Pour elle, c’est d’abord sa technique qui a évolué depuis le début de sa carrière. Autodidacte, la DJ n’est pas passée par une école de son, la musique électronique à ses débuts n’était pas aussi connue et reconnue qu’elle l’est aujourd’hui : « Je n’avais pas de modèle, encore moins féminin pour me dire ‘j’ai envie de faire ça et comme ça’ : j’ai fait mon chemin un peu à l’aveugle. Ce qui est différent aujourd’hui, c’est surtout le fait que j’ai acquis des connaissances techniques par la force des choses et j’ai de plus en plus affirmé mon son. »
Si CHLOÉ déplorait l’absence de modèles auxquelles s’identifier à ses débuts, elle a ouvert la voie à de nombreuses artistes : « J’ai toujours fait les choses comme je voulais les faire, j’avais besoin d’expérimenter, de chercher, je ne voulais pas être chanteuse ni faire partie d’un groupe de rock, j’ai fait mon chemin pas à pas de façon hyper organique et il s’avère que je suis encore là aujourd’hui. C’est vrai qu’au cours de ces années-là, il y a des femmes qui sont venues me voir ou m’ont écrit pour me dire que c’est parce qu’elles m’avaient vue mixer ou qu’elles avaient écouté mes disques qu’elles savaient que c’était possible. C’est quelque chose qui m’a choquée, je me rendais pas compte à quel point c’était important de voir des modèles. » Elle évoque aussi la question de la parité dans les programmations, notamment de festivals, qui permet de créer des modèles et de montrer aux jeunes générations que c’est possible. Pour elle, c’est quelque chose qu’il faut imposer pour montrer que ce sont des exemples qui existent : « C’est quelque chose dont j’ai pris conscience plus tard, je ne l’ai pas ressenti au début, tout simplement parce que je n’avais pas de plan de carrière. Quand j’ai commencé, c’était pas un métier à la base, d’être DJ. »
En ce sens, le show de clôture des Jeux Paralympiques a aussi été très important en termes de reconnaissance, à la fois d’artistes comme CHLOÉ mais également de façon plus générale pour les musiques électroniques : « J’ai trouvé ça super que toutes les scènes, et en général la musique électronique, soient autant mises en avant. Tous·tes les artistes qui étaient là, on rayonne beaucoup à l’étranger et on représente la France. On était 24 artistes, qui venons de scènes différentes, même si l’on se connaît tous·tes plus ou moins, mais c’était chouette de se retrouver ensemble dans la même histoire. Le projet, c’était de retracer l’histoire depuis les ondes Martenot dont on fêtait les 100 ans et de voir les différentes générations et la diversité des courants des musiques électroniques en créant ce back to back géant dans quelque chose de fédérateur. C’est important aussi de rappeler que les valeurs portées par les Jeux Paralympiques sont les valeurs mêmes que porte la musique électronique : des valeurs d’unité et d’inclusivité. »
CHLOÉ nous explique poursuivre la même recherche depuis le début de son parcours et cette identité qu’elle s’est forgée en tant qu’artiste se retrouve immédiatement à l’écoute d’Intronics. Le morceau éponyme est une référence aux sonorités acid house qu’on pouvait trouver dans la scène belge des années 1990, Intronics comme un rappel à Technotronic à qui on doit le morceau « Pump up the jam » ou « Get up ». Le deuxième morceau, « Zeitnot » doit son nom au vocabulaire des échecs où il désigne une situation où un·e joueur·se a très peu de temps restant sur son horloge pour effectuer ses coups. Cela peut entraîner une pression psychologique et souvent des erreurs, car il faut jouer rapidement. Cela évoque une forme de pression et d’urgence à jouer. Il y avait pour la musicienne une forme de pression à sortir cet EP : « Une pression que je ressentais personnellement, c’est un EP que je sors sur mon label, ce n’est pas une commande, c’est une envie hâtive. »
Un EP, deux morceaux qui puisent dans l’énergie résolument club de la musique de CHLOÉ qui sera présente, le lendemain de la sortie de l’EP, derrière le booth de MENERGY pour fêter les 10 ans de l’iconique soirée gay parisienne : « C’est une soirée toujours très spéciale pour moi, où j’adore jouer et où j’ai joué régulièrement. À mes débuts, je jouais pas mal dans les soirées Têtu, dans des soirées gay de mecs. C’est important car c’est des safe spaces qu’il faut préserver et garder. Il y a une ouverture d’esprit qui est aussi ce pourquoi je suis venue à la musique électronique. Donc j’étais très heureuse de pouvoir jouer à l’anniversaire de cette soirée que j’affectionne particulièrement. »
Intronics, disponible le 25 octobre (Lumière Noire)|Retrouvez CHLOÉ à MENERGY au Gibus le 26 octobre. (lien billetterie)