Oete est un être doux et poétique comme l’indique son nom d’artiste : « poète sans le p- déjà ». C’est aussi quelqu’un dont tout le travail artistique est tourné vers l’autre. Derrière ce nom, à prononcer « eux-te », il fait exister une multitude de pronoms, du je au vous en passant par les autres, les eux et elles qu’il invite dans ses chansons.
La musique, une thérapie contre les carences d’amour
Oete a 24 ans et est auteur-compositeur et interprète de ses chansons qui sont pour lui des thérapies. Lorsqu’on lui demande quelles sont ses névroses et ce que la musique vient soigner pour lui, il nous répond simplement que ce « sont les carences d’amour en général. L’amour est pluriel, je parle d’amour en général pas juste de l’amour sous la forme du couple. C’est ça mes névroses et la musique est pour moi la manière la plus instinctive de les exprimer. » Sa musique, c’est une revanche sur ces carences d’amours qui habitent chacun de ses morceaux. « Quand je suis sur scène, devant des gens, en train de chanter ça, de danser dessus, de les fêter, je prends une revanche. »
L’amour au sens large, puisqu’Oete va aborder aussi bien le lien père-fils, que le sentiment amoureux ou l’amour pour soi-même dans ses chansons qui viennent parler de l’acceptation de soi. On peut même voir l’amour dans le titre HPV qui parle du papillomavirus qui, au final, découle d’un acte d’amour, nous explique-t-il.
Oete revendique le terme de variété qu’il se réapproprie en lui accolant l’adjectif d’alternative. « Quand on parle de variété française, on peut penser à des artistes comme Claude François ou certains qui peuvent être peut-être un peu poussiéreux et où l’on sent moins de fêlure. Mais il y a aussi des références, comme Niagara, dans les années 1980 ». Quant à lui, il se situe quelque part entre un Baschung, un Christophe et un Daniel Dark qui auraient croisé la route de Muriel Moreno de Niagara.
Oete : l’androgynie et les codes du genre
Oete impose sa voix et son allure androgyne et joue, presque malgré lui ou sans le vouloir avec les codes du genre : « Je ne sais pas si je joue avec les codes du genre. Ça a toujours été le cas, depuis que je suis gamin, dès que j’ai pu décrocher un téléphone pour répondre, on m’a dit ‘Oui, bonjour madame’. C’est quelque chose qui est là depuis très très longtemps finalement. » Ce n’est pas un jeu mais une manière d’être, une liberté de s’autoriser à porter autant un crop top que des pièces d’un vestiaire beaucoup plus masculin. Si on lui demande si on est dans une période de libération des codes du genre, Oete nous répond qu’il voit notre époque comme « les prémisses du retournement social qui aura lieu pendant le siècle prochain » Pour lui, on est dans une période de déconstruction qui entraîne avec elle des extrémistes haineux·ses : « Celles et ceux qui ne peuvent pas vivre d’amour vivent d’abord de haine, c’est ce qui les entretient. » Mais pour Oete, nous sommes à l’aube d’une nouvelle époque qui est liée à l’accessibilité des réseaux sociaux qui permettent de se déconstruire de plus en plus tôt. « J’ai connu les réseaux sociaux à l’adolescence mais aujourd’hui un enfant de 10 ans avec un téléphone dans les mains peut découvrir tout un tas de choses qu’il ne connaît pas et qui lui donneront des références et lui montreront que toutes ces choses-là sont possibles. » Oete nous prédit que d’ici deux générations, cette déconstruction sera un élément essentiel et on ne pourra que se féliciter d’y avoir participé.
Pour y participer, il suffit presque de suivre Oete sur sa tournée aux mois de mars et d’avril. Et puis il nous dévoile une actu qui nous fait froncer les sourcils, confidence de fin d’interview : « On prépare un essai… Enfin, le terme d’essai en littérature mais transposé à la caméra. J’ai voulu illustrer le clip de Cobra avec un court-métrage, un mini-documentaire qui sortira bientôt qui dure juste le temps de la chanson. Et j’ai hâte. » Et en attendant, nous aussi, nous avons hâte de découvrir davantage cet artiste qui, s’il ne joue pas sciemment avec les codes du genre, joue très clairement avec ceux de la variété française.