A l’occasion du 8 mars, Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, le collectif Nous Aussi a mené à Paris différentes actions d’appropriation féministe de l’espace public. On a décidé de relayer leur appel, que vous pouvez retrouver par ici sur Facebook.
8 Mars : Nous Aussi,
nous savons envahir la ville
Ce matin, 8 mars, des militantes féministes se reconnaissant dans l’initiative « Nous Aussi » ont décidé d’honorer la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes par des actions d’appropriation féministe de l’espace public.
Depuis trop longtemps, cette date importante, héritée des luttes des femmes qui se sont levées et organisées contre les oppressions, a été réduite à une célébration des « qualités » qui nous sont assignées par la société pour mieux nous dominer. Le 8 mars est devenu une occasion de célébration du patriarcat par lui-même, une énième occasion pour les entreprises d’envahir l’espace public avec des slogans publicitaires tous plus humiliants les uns que les autres, et pour les institutions de faire de la communication sans annoncer de mesures concrètes. Le 8 mars, des patrons, des publicitaires et des journalistes nous rêvent toujours plus dociles et souriantes avec notre électroménager à prix cassé et nos 3 slips pour le prix d’un.
Pour lutter contre cette appropriation capitaliste de nos luttes féministes nous avons envahi la ville de nos slogans de lutte, de nos revendications diverses et radicales.
Nous voulons rappeler que nos intérêts en tant que femmes, racisées, lesbiennes, trans, musulmanes, handicapées, personnes trans, intersexes et non-binaires sont incompatibles avec les intérêts des institutions dont le pouvoir repose sur notre oppression et asservissement.
En visant des lieux comme l’Assemblée Nationale, le Palais de Justice, le siège des Républicains, le centre de psychiatrie et de neurosciences Sainte-Anne, et d’autres encore, nous profitons de cette journée du 8 mars pour dénoncer certaines des structures de pouvoir qui agissent directement contre nos vies, nos communautés, nos libertés, et nos désirs, et qui participent jour après jour à rendre notre monde toujours moins vivable.
Nous affirmons que malgré la saturation publicitaire et policière de l’espace public, il est possible d’affirmer un féminisme indocile à sa récupération par le capitalisme et son garant carcéral, qui assume son potentiel d’appropriation de l’espace public, de riposte partout, tout le temps, et pas seulement dans le cadre de manifestations encadrées et surveillées.
Enfin, nous voulons nous adresser aux femmes et aux minorités de genre en colère contre cette confiscation de l’espace dit public par les institutions et les entreprises, en affichant notre solidarité avec toutes les victimes d’oppressions et d’exploitation. Avec cette action, nous exprimons notre solidarité avec toutes les femmes tuées aux frontières, celles mortes du sida, celles assassinées par leurs conjoints ou ex-conjoints, celles violées ou agressées depuis leur plus jeune âge, dans leur foyer, leur entreprise ou leur fac, les travailleuses licenciées car syndiquées (#BoycottYvesRocher !) et celles exploitées dans les prisons, celles infantilisées et maltraitées à cause de leur handicap, celles qu’on a voulu et qu’on veut encore stériliser, celles qui n’ont toujours pas le droit de fonder des familles, celles forcées à enfanter, et toutes celles qui, de par le monde, célébreront également cette journée avec leur dignité, leur force, leurs joies, leurs luttes. Pour celles qui nous ont précédées, et celles qui viendront ensuite.
En ce 8 mars, nous saluons l’appel transnational porté par nos camarades féministes depuis de nombreux pays du monde. Depuis 2015, les féministes des Amériques Latines s’organisent, via des collectifs comme Ni Una Menos, contre les féminicides et appellent à célébrer le 8 mars par la grève pour déployer nos revendications dans l’espace public et penser ensemble les luttes à venir. En Italie, Non Una di Meno appelle à une « grève du et des genres, du travail productif et reproductif, et de la consommation » et l’année dernière, un million de grévistes avaient été comptabilisé et 120 manifestations organisées dans tout l’Etat espagnol. Cette année, les féministes de Suisse et de Belgique ont également initié des appels à la grève qui s’annoncent assez massivement suivis.
Alors que cette question de la grève des femmes n’a pas été véritablement investie par les organisations féministes et syndicales françaises, nous appelons l’ensemble des féministes à s’engager dans une démarche collective qui puisse nous permettre de rejoindre cette dynamique internationale. Nous voulons pouvoir faire entendre et exister nos revendications sur la scène politique, pour protéger le travail des femmes et nous organiser contre la dé-régularisation du marché du travail. Contre l’isolement imposé par les politiques néolibérales, nous voulons construire des solidarités féministes, aux côtés de nos camarades du monde entier, au-delà des frontières !
Luttons ensemble !