La semaine dernière, on vous avait parlé du documentaire The Real Houseviwes of Neukölln à travers une interview du réalisateur Réda Aït. Aujourd’hui, c’est à la drag queen Ash Traylia qu’on a donné la parole. Enjoy.
Friction : Tout d’abord, J’ai assisté à ta performance électrique à l’avant première parisienne du film, c’était comment de te produire à Paris ?
AS: Performer à Paris était très spécial- romantique et intuitif. En quittant l’espace, après avoir fait mes valises, je suis sorti pour attraper la Tour Eiffel exhibant ses lumières scintillantes. Il était également intéressant d’entendre les réactions du public et de découvrir l’obsession française pour l’esthétique, mais aussi une génération de jeunes qui veulent dépasser ça.
Comment est la scène berlinoise aujourd’hui ?
AS: Je ne peux pas parler au nom de toute la « scène », elle est trop large et mes cercles sont relativement petits. Cependant, mon expérience de cette notion est celle d’une communauté de collaborateurs colorés qui sont remplis d’énergies créatives, à la suite d’avoir fais les premiers pas vers leur destin en tant que personnes queers- peu importe ce que cela veut dire pour chacun d’entre eux.
Dis-nous en plus sur Ash Traylia, qui est-elle ?
AS: Elle est née par nécessité – je devais présenter une projection de Ru Paul’s Drag Race en 2016 et je n’ai trouvé personne pour m’aider avec le maquillage complexe que j’avais conçue pour la prédécesseur d’Ash, Victoria Honesty (69 fois ancienne championne du monde de catch). J’étais, à ce moment, à la fois paresseux, arrogant et je fumais une cigarette. J’ai effectué un rapide voyage intérieur et Ash Traylia est apparue. Depuis, j’ai affiné une perspective qui vit à l’intérieur de moi, d’une autre époque, de quand j’avais 15 ou 16 ans et que j’étais un élève boursier dans un pensionnat cher en Australie. Elle est la voix féminine qui a été réduite au silence par les pouvoirs patriarcaux et institutionnels durant cette période de ma vie. J’avais peur de me présenter comme trop féminin, et donc beaucoup de grands monologues ont été enfermés dans mon cerveau. Une fois que j’ai enfin trouvé les clés de ce coffre au trésor (merci Berlin), j’ai créé un récit semi-fictif autour d’elle. Ash Traylia est une chercheuse de soleil de la Gold Coast qui aime se rebeller contre ses parents riches et poster sur sa spiritualité sur Facebook. Elle a une relation fragmentée avec ses parents divorcés, en particulier sa mère, dont elle s’est sentie déconnectée. Cette dernière avait en effet refusé d’envoyer Ash en cure de désintoxication pour sa dépendance aux Oreos, qui l’a finalement rendue végétalienne à l’âge de 9 ans. C’était une étudiante compétitive et brillante, qui se retrouva tiraillée lorsqu’elle fut acceptée à la fois à la fac de droit et celle de médecine. Pour résoudre ce problème, elle les a toutes les deux envoyer chier et a démarrer un voyage Contikien Europe. Depuis, elle est restée bloquée dans cette situation et affirme qu’elle est en voyage spirituel alors qu’au fond d’elle elle sait qu’elle continue à prendre des drogues hallucinogènes seulement parce qu’elle ne sait pas comment faire face à ses problèmes.
Le drag est un acte politique en soi en raison de sa subversion des normes de genre, mais ton drag, à travers l’humour et le personnage de la meuf blanche de classe moyenne, semble délivrer un vrai message politique qui va au-delà de ça. Tu peux m’en dire un peu plus là dessus ?
AS: J’utilise Ash pour exprimer une critique socio-politique de l’Australie et pour plaider en faveur d’une plus grande acceptation du changement dans l’esprit et le cœur des gens. Sous la politique il y a les mesures politiques, faites par les humains pour les humains, mais de mon point de vue, il semble que l’humanité ait été oubliée. Les politiques devraient changer et s’adapter pour aider les gens qui vivent sous elles, mais nous, en tant qu’espèce, oublions que nous vivons dans un univers qui n’est pas statique mais qui bouge, se transforme, croît, évolue et se décompose de nouveau. Si nous allons nous rappeler comment prendre soin de nous-mêmes et nous aimer les uns les autres, je crois que nous devons rétablir collectivement nos relations avec l’engagement et le lâcher-prise. Cela se manifeste aujourd’hui dans le combat principal d’Ash pour l’égalité des droits de tous les peuples, en déconstruisant et en invalidant les structures patriarcales réductrices, et en transmettant le pouvoir aux minorités qui souffrent et qui ont souffert, à plusieurs reprises, pendant des générations sous le statu quo actuel.
Je t’ai vu performer avec les autres Real Housewives of Neuköln à Frrruity, à Berlin, et j’ai adoré la façon dont vous utilisez le drag pour exposer des enjeux politiques et sociaux. Aujourd’hui, quelles sont pour toi les relations entre l’activisme et le drag ?
AS: En ce qui concerne le mouvement LGBT, le drag a été la « bombe atomique » dans notre arsenal d’armées. les drag queens ont été les visages de la voix de la communauté pendant une longue période et je comprend pourquoi – un leader est un rôle, pas une personne. Lorsque moi-même et d’autres drag queens, comme les Real Housewives of Neukölln, montons sur scène en robe, perruque, maquillage et talons, nous jouons un rôle – et rendre ça amusant et abordable aide à équilibrer le ton agressif que nous associons souvent aux «questions sérieuses». C’est un moyen important d’encourager tous les types de personnes à devenir plus actifs politiquement, et à se lever pour leurs droits.
Comment est-ce que les autres queens et toi avez formé les Real Housewives of Neukölln ?
AS: Nous étions toutes des fans du show de Olympia Bukkakis « Bump Day » à The Club, qui y avait lieu tous les vendredi avant la naissance des housewives. Quand Olympia est partie vers d’autres horizons, il y avait un trou qui avait besoin d’être rempli. C’était le signal pour des wanabees drag queens riant à leurs propres blagues dans des toilettes du Berghain, quand soudainement elles ont eu une idée brillante…
Tu peux m’en dire un peu plus sur cette approche du drag de façon trash / DIY ?
AS: Être trash, c’est piller les poubelles de ton monde physique et de ton âme immortelle, et y pêcher les parties qui valent la peine d’être gardées. Prend une putain de tonne de spray pour les cheveux et quelques épingles à nourrices, et enveloppe tout ce matériel autour de ta taille, peu importe ce que Michelle Verssinage ou quiconque pense de ça.
Quelle est la prochaine étape pour les Real Housewives of Neukölln et pour Ash Traylia ?
AS: Je ne peux pas parler pour les Housewives car nous avons pris des chemins séparés, mais je sais qu’elles prennent d’assault Berlin rapidement. Elles ont récemment performé à Hamburger Bahnhof, et j’ai entendu des chuchotements au sujet d’une drag party dans un donjon sexuel de Schnonberg, mais qui sait, tout ceci n’est que rumeur. Elles sont tellement scandaleuses et hors de contrôle et j’admire vraiment ce qu’elles font, je les aimerai toujours telles mes soeurs. Ash Traylia a finalement réservé son billet de retour pour l’Australie en utilisant la carte de crédit de sa mère. Elle va vivre à Perth où elle espère épouser un mineur secrètement homosexuel, et divorcer de lui en direct à la télévision. Ce sera pour elle une performance sur le plébiscite du mariage homosexuel, actuellement en cours là bas.
With $525 million of tax payer money being spent, it's time for my two cents on the same sex marriage plebiscite. Australia, there's less than 24 hours left to enrol. Enrol yourself, share this video, vote yes and keep being fabulous. If we can't love each other, how the hell is anyone else going to love us?
Publié par Ash Traylia sur mardi 22 août 2017