Bertoulle Beaurebec est une femme, noire, travailleuse du sexe, pansexuelle, polyamoureuse. Elle se définit fièrement comme une salope. Elle publie « Balance ton corps. Manifeste pour le droit des femmes à disposer de leur corps » aux éditions de La Musardine. Dans ce livre, il est question de travail du sexe mais surtout de féminisme pro-choix et de la liberté de s’émanciper des injonctions du système hétéropatriarcal. Nous l’avons rencontrée.
La première question que je voulais te poser concerne le titre du livre. L’expression « Balance ton porc » était à entendre au sens de « dénonce ton porc », là on n’est pas dans la dénonciation, au contraire même. Est-ce que tu peux nous expliquer le choix que tu as fait de ce titre-là ?
C’est pas mon idée. J’étais partie sur un autre titre un peu plus frontal qui est le titre de la première partie « De l’art d’être une salope ». On cherchait un autre titre, parce qu’on s’est dit que le mot « salope » ça passerait pas, pour les libraires, pour faire la promo du livre, c’était peut-être un peu trop frontal. La directrice de collection a eu une épiphanie et a proposé « Balance ton corps ». Ça n’a pas le même sens que « Balance ton porc ». Mais même si on ne parle pas de la même façon des corps qu’on parlait des porcs, la place du corps est centrale dans le livre et ma vision de comment on devrait le traiter, comment on devrait le percevoir et l’utiliser fait que je dis quand même pas mal de choses là-dessus donc ça semblait quand même pertinent.
A qui est-ce que ce livre est adressé ? Est-ce qu’il s’adresse aux femmes en prônant l’émancipation des standards établis par les hommes cisgenres et hétérosexuels ? Ou s’adresse-t-il à ces hommes justement, dans l’idée de faire bouger les lignes ? Pour qui est-ce que tu l’écris, ce livre ?
Je l’écris pour tout le monde. Je ne l’écris surtout pas que pour les personnes queer ou pour les travailleur.ses du sexe. À part les aspects anecdotiques que je racontelié au travail du sexe, les travailleuses du sexe n’apprendront rien avec ce livre. Mais je l’écris pour les personnes qui avaient pas mal de préjugés, d’idées préconçues par rapport aux salopes, aux filles qui vivent leur sexualité librement, qui s’habillent comme elles veulent et surtout par rapport aux TDS, parce que finalement ce sont des stéréotypes qui font le plus de mal. Je l’écris pour ces personnes-là qui ne sont pas déjà activistes, qui font pas partie de la communauté queer. Et j’écris pour les personnes qui sont TDS mais qui ne le vivent pas forcément bien à cause de ce qu’on nous inculque dans la société. C’est à la fois pour faire exister ma parole dans l’espace médiatique et littéraire, certes, mais aussi pour être lue par des gens que je n’aurais jamais rencontrés, avec qui je n’aurais jamais eu l’occasion de débattre de ces questions-là, avec qui je n’aurais jamais eu l’occasion d’échanger sur ma réalité, une réalité que je partage avec pas mal de personnes marginalisées.
C’est important pour toi de te réapproprier le terme de « salope » mais beaucoup de TDS font le choix de se réapproprier le terme de « pute », pourquoi lui préférer le mot « salope » ?
Je n’ai pas choisi. En fait j’utilise les deux. « Pute » c’est pour le travail du sexe et la prostitution et « salope », c’est pour celles qui ont plusieurs partenaires et qui n’ont pas une sexualité qu’on peut considérer comme étant celle d’une femme respectable. J’utilise les deux termes, je m’appelle autant « pute » que « salope » mais il me semblait important aussi de parler des salopes. Il y a déjà un militantisme en France, porté par les concerné.e.s pour faire en sorte que le mot « pute » ne soit plus une insulte. Dans les interview, on m’entend utiliser le mot «pute » parce que ce n’est pas une insulte, j’utilise des néologismes comme la « puterie » pour parler de la prostitution. Ça, on le fait déjà. En revanche, « salope » c’est un terme qui fait encore peur et qui blesse encore pas mal de femmes aujourd’hui, c’est pour ça que je mets l’accent là-dessus, je pense qu’il est temps qu’on se libère de cette peur liée à ce terme qui est aussi descriptif que le mot « pute ».
Ton livre prône l’émancipation de toutes, du coup, par quels moyens on peut lutter pour cette émancipation ? Tu parles notamment beaucoup d’éducation… Est-ce que tu peux revenir un peu sur les moyens qu’on peut avoir pour lutter pour cette émancipation ?
Je pense que déjà, l’éducation passe par soi-même. L’éducation, c’est le rôle des adultes mais en tant qu’adulte on doit aussi checker avant de pouvoir transmettre des choses aux enfants : est-ce qu’on sait vraiment tout ce qu’il y a à savoir ? est-ce qu’on n’a pas des choses à apprendre ? Malheureusement, je pense pas que l’on puisse compter sur le gouvernement actuel pour une éducation sexuelle complète et inclusive. Pour moi, une bonne méthode, ce serait que déjà en tant que parents, en tant qu’adultes qui participent à l’éducation des enfants, qu’au niveau de la famille même (que ce soit les oncles, les tantes, les parents, les grands-parents etc.), on fasse cette démarche là de se déculpabiliser par rapport au sexe, de faire en sorte que ce soit plus une conversation gênante pour pouvoir ensuite, dans le cercle familial, contrer la désinformation à l’école en pouvant répondre aux questions des enfants, en pouvant les éduquer et en pouvant vraiment les accompagner sexuellement.
Tu parles aussi beaucoup de représentations qu’on peut avoir dans le société des TDS. Est-ce que c’est au travers la parole des concerné.e.s et par le discours qu’on peut construire sur ces métiers-là qu’on peut les faire évoluer ?
Effectivement, moi je suis vraiment partisane de laisser les concerné.e.s s’exprimer sur leur vécu et surtout leur accorder de l’importance et un statut d’expert.e.s – surtout quand c’est pour des métiers comme ça, aussi peu connus, des métiers stigmatisés et qui sont exercés librement par certaines personnes – on devrait pouvoir expliquer ce que sont les réalités de ces métiers. Ensuite, dans l’art, dans les représentations artistiques, cinématographiques, il faut que ce soit l’art des concerné.e.s qui soit mis en avant pour pas que l’on soit vu.e.s par le prisme du sensationnalisme, par les fantasmes des mecs cis qui vont traiter la prostitution sous un angle complètement tordu et qui contribuent à véhiculer des stéréotypes qui participent au stigma. C’est important qu’on puisse aussi mettre en valeur les formes d’expression artistique des personnes concernées. Je suis artiste aussi, j’étais artiste avant d’être travailleuse du sexe mais je le suis toujours. Je sais que mon statut de femme, noire, travailleuse du sexe fait que dans certaines sphères artistiques je n’ai pas mon mot à dire et ce serait très difficile pour moi de proposer des histoires, de raconter des histoires telles que moi je les perçois parce qu’il y a ce filtre hétéronormatif qui fait que souvent dans les hautes sphères de l’art, en règle générale, il n’y a qu’un certain point de vue qui est accepté et ça permet aux personnes en position de domination d’asseoir encore leur domination au détriment des personnes qu’elles représentent par le biais de fantasmes…
En tant que femme, noire, travailleuse du sexe, artiste, est-ce qu’il t’est difficile de communiquer sur ton livre ?
Non, justement, ce qui est intéressant c’est qu’en ayant écrit ce livre, j’ai acquis une certaine légitimité, j’ai l’impression que ça ouvre une porte, et c’est bien parce que mon objectif, encore une fois, c’était de toucher des personnes qui n’étaient pas forcément d’accord avec moi et j’ai l’impression que ça fonctionne. Maintenant, je n’ai toujours pas la main mise sur la façon dont ça va être présenté. Depuis le début de la promotion du livre, ce que je remarque, c’est que clairement le livre parle de la prostitution mais ça parle aussi d’énormément d’autres choses et malgré des entretiens qui peuvent durer 45 minutes, une heure, au final le résultat est souvent axé sur la prostitution, sur le fait qu’une travailleuse du sexe écrit et s’exprime. Ça ne date pas d’hier, dès qu’on parle de prostitution, il y a une engouement médiatique mais qui est souvent sensationnaliste, on veut en parler parce qu’on sait que ça va intéresser, parce qu’on sait que ça va créer le débat, que ça va faire jaser. Le souci avec Balance ton corps, c’est que ça ne traite pas vraiment de ça et je ne suis pas seulement une travailleuse du sexe. Je sais pourquoi ça marche, mais l’angle d’analyse n’est pas toujours le plus honnête. Certes, ça ouvre des portes, mais comment est-ce qu’on va parler du livre ? C’est sûr que pour l’instant, j’ai des entretiens mais la question c’est : pourquoi ?
Finalement le travail du sexe est assez marginal dans le livre, tu parles davantage des représentations, de la construction de la féminité, de la masculinité. Tu parles aussi des injonctions qui pèsent sur les hommes cis et tu invites à penser une masculinité positive, est-ce que tu peux revenir sur ce que ça veut dire pour toi ?
Ça part d’un constat, les injonctions du système hétéropatriarcal qu’on peut subir. En me politisant, j’ai remarqué que ça me touchait, moi, j’ai remarqué des éléments qui touchaient les personnes sexisées [l’expression désigne les personnes qui subissent le versant sexiste des injonctions hétéropatriarcales : les femmes racisées et blanches, les personnes intersexes, les personnes non-binaires notamment, NDLR] qui vivaient les mêmes oppressions que moi. Et au fur et à mesure je me suis rendue compte que même les dominants sont pris dans le système hétéropatriarcal d’une façon différente mais c’est un système qui, au final, oppresse même les dominants. La place de dominant, il faut la gagner par des comportements qui vont faire que les hommes cis vont mériter ce statut-là : il faut être alpha, il faut être l’instigateur des relations, etc. Mais ça, évidemment, ce n’est pas la réalité ou la personnalité de tous les hommes cis. On est tous.tes complexes, on a tous.tes des personnalités, et il y a des gens à qui ça correspond et pour ceux à qui ça ne correspond pas, ça les aliène. Ça me semblait intéressant d’en parler parce que finalement le féminisme, c’est pas que pour les femmes, c’est pas que pour les personnes sexisées, c’est pour tout le monde. Le fait de se défaire de ces injonctions-là, c’est pour que tout le monde puisse avoir l’espace d’être soi-même indépendamment des attentes qu’on projette sur nous depuis notre naissance. C’était important d’en parler parce qu’on partage le monde avec les hommes, et c’est pas près de changer. C’est très bien d’être en non-mixité, de pouvoir échanger des idées, des stratégies de survie, de pouvoir développer une présence politique, de créer du contenu, de créer de la pensée mais il faut aussi proposer des alternatives aux hommes. Leur dire : « On vous voit aussi et on voit ce que l’hétéropatriarcat vous fait, si vous n’en avez pas conscience, regardez. Vous les garçons, vous les hommes, on vous apprend depuis toujours à ravaler vos émotions, à vous déshumaniser vous-mêmes. Est-ce que c’est réellement agréable ? Regardez-vous dans le miroir et posez-vous la question. »
En parlant de féminisme, tu évoques les abolitionnistes en disant qu’elles sont des « féministes extrêmes » qui « souhaitent libérer les femmes des injonctions patriarcales pour les entraver de nouveaux diktats matriarcaux ». Mais est-ce qu’au fond on peut considérer les abolitionnistes comme des féministes puisqu’elles nient la liberté des TDS et leurs vécus ?
Il y a une histoire du mouvement féministe abolitionniste, ça ne date pas d’aujourd’hui et la réalité, c’est qu’il y a des féminismes. Il y a plusieurs façons d’être féministe et les abolitionnistes sont persuadées d’avoir raison comme je suis persuadée d’avoir raison. Ma façon de vivre mon féminisme étant pro-choix, par définition, pour moi, on fait ce qu’on veut, on porte le voile si on veut, on avorte si on veut, on est travailleuse du sexe si on veut. Mon féminisme, il est aussi intersectionnel, il est le plus inclusif possible. On ne va pas donner des conditions aux femmes pour avoir le droit d’être considérées comme des êtres humains à part entière qui ont autant de valeur que tous les autres. Leur féminisme n’est pas nécessairement inclusif et c’est ça qui va me déranger, c’est le fait que leur féminisme soit sous condition. Pour moi, un féminisme sous condition dans un monde tel que le nôtre, ce n’est pas du féminisme. Et pour elles, mon féminisme à moi, n’est pas du vrai féminisme parce qu’il n’a pas assez de règles et parce qu’il accepte des choses qu’il ne devrait pas accepter. Il faut être capable de regarder l’autre, malgré les divergences, malgré le fait que leur féminisme contribue à faciliter les violences et les meurtres de certaines personnes – par exemple, les TERF [trans exclusionnary radical feminists, les féministes qui ne reconnaissent pas les femmes trans comme des femmes, NDLR] alimentent aussi ce climat de transphobie qui contribue aux violences envers les personnes trans. Elles, elles sont OK avec ça, parce que c’est nécessaire pour faire avancer leur conception du féminisme. Mon féminisme est beaucoup plus inclusif mais on a toutes le sentiment d’avoir raison. Il s’agit d’ouvrir le dialogue, et de par le travail d’énormément d’activistes pro-choix, comme par exemple le travail de Tan Polyvalence avec Par et Pour, une plateforme de témoignages de travailleurs.ses du sexe, on peut voir que les abolitionnistes peuvent changer d’avis, elles peuvent s’éduquer. J’ai espoir en produisant de la pensée, en produisant du contenu, en nous asseyant autour d’un table – douloureusement, certes, mais il faut le faire – qu’on puisse briser les murs et les frontières de la pensée. Il faut être capable d’adopter un autre point de vue. C’est pour ça que ce que j’essaie de faire, ce qu’essaient de faire beaucoup d’activistes, en étant intersectionnel.le.s, c’est de libérer la parole des personnes sexisées, marginalisées, queer, et de faire entendre aux féministes abolitionnistes qui, en général, sont bourgeoises, blanches et hétéras, qu’il y a d’autres réalités que la leur, que ce qu’elles font c’est reproduire les façons de faire des dominants qu’elles combattent. Elles se positionnent en tant que dominantes par rapport à d’autres qui sont marginalisé.e.s.
Comment s’est construit ton parcours militant ?
J’ai commencé par me politiser via le féminisme blanc parce que c’était les contenus que je trouvais le plus facilement quand j’étais connectée sur internet. J’ai toujours beaucoup lu mais pas toujours des essais, de la politique, ça ne m’intéressait pas trop. Quand j’ai commencé à me politiser, j’ai commencé à me politiser à travers les plateformes féministes mainstream, à travers le féminisme blanc en France qui prévaut et qui est beaucoup plus audible que le féminisme intersectionnel, qui a encore beaucoup de mal à se faire entendre comme étant du vrai féminisme, d’ailleurs. Très rapidement je me suis rendue compte qu’il y avait des vides, et je n’avais pas le sentiment d’être représentée par ce féminisme-là parce qu’il était question du sexisme spécifique qui touchait les femmes blanches et il n’y avait pas ces nuances. Lorsqu’on est une femme et une femme noire on subit en même temps sexisme et racisme. La misogynoir, c’est sur le tard que j’ai appris ce terme et j’ai découvert l’afroféminisme après. C’est vraiment à force de ne pas me sentir représentée dans des débats, qui certes avaient leur légitimité, mais qui ne prenaient pas en compte les oppressions que je vivais. Il y avait des nuances qui n’étaient clairement pas représentées. Au fur et à mesure, en cherchant d’autres types de féminisme, en cherchant un féminisme qui me parlerait à moi, j’ai découvert l’afroféminisme, et je me suis dit qu’on parlait de mon vécu. Il y avait une pensée politique qui partait de mon endroit, ce qui est quand même important. Les féministes blanches ont totalement raison de s’exprimer sur leur vécu mais il ne faut pas universaliser les vécus de certaines au détriment des vécus des autres. Ça s’est fait au fur et à mesure mais ça s’est fait assez tôt, je pense que vers 14 ou 15 ans j’ai pris conscience qu’on vivait dans un monde patriarcal et qu’il y avait énormément de pensées à mettre en avant aussi pour favoriser des changements.
Dans ton livre, tu racontes que tu as pris conscience très tôt des oppressions dont tu étais victime en tant que femme noire. Tu racontes qu’elle a eu lieu assez jeune cette prise de conscience, comment est-ce que toi t’as réussi à te défaire, ou au moins à composer avec ces oppressions ?
Quand on ouvre une machinerie et qu’on regarde comment ça fonctionne, elle fait un peu moins peur, elle est un peu moins impressionnante. Quand je fais face à un comportement problématique, que ce soit un comportement sexiste ou raciste, je comprends les tenants et les aboutissants, je comprends historiquement d’où ce type de pensée vient et ça lui enlève un peu de sa substance émotionnellement. Le fait d’être activiste, ça permet de mettre une distance, intellectuelle et historique et qui va être nourrie par le savoir et on se protège un peu plus émotionnellement, je crois. La différence entre comment je vis maintenant ces micro-agressions ou ces agressions tout court et comment je les vivais il y a dix ans, c’est ça : je comprends le monde dans lequel j’évolue et ça me permet de supporter mieux émotionnellement, même si je reste humaine et que ça me touche. Ça permet en tout cas de pas en souffrir dans sa chair et d’être dans l’incompréhension.
Et ça a changé quelque chose dans ton travail, le fait d’avoir un militantisme féministe ? Tu dis avoir arrêté de danser dans des strip clubs parce que ça ne correspondait plus à ta vision des choses, est-ce que le fait d’être féministe, afroféministe, ça a changé d’autres choses dans ta façon d’appréhender ton travail ?
J’ai remarqué que dans l’escorting j’attirais un certain type de clients, des hommes blancs, relativement âgés, relativement fortunés. Et ça c’était dû à quoi ? A la fétichisation des femmes, au fait qu’on projette une hypersexualité sur les femmes noires, ça, c’est une projection qui date de la colonisation mais qui existe encore dans les mœurs et qui fait qu’énormément d’hommes blancs fantasment sur les femmes noires. Et j’attirais souvent ce type d’hommes-là, qui en plus étaient des hommes riches, donc il y avait des rapports de domination de classe. Mais ils s’attendaient à quelque chose, et je suis arrivée en étant moi, donc ça a permis une déconstruction, de les mettre face à leur fétichisation, à leur racisme bienveillant, qui pour moi est un des pires. Ça a été très intéressant, à la fois de travailler en tant qu’escort mais aussi de déconstruire politiquement mes clients. Étant donné que je faisais de l’escorting de luxe, c’était souvent des relations sur le long terme, et ils partaient avec une projection de ce que j’étais et ils se retrouvaient avec une personne complexe très éloignée du cliché qu’ils se représentaient. Pour moi, c’est vraiment aussi une forme d’activisme. Mon approche du TDS est aussi clairement politique.
Tu évoques ta « spiritualité de salope ». Est-ce que tu peux revenir là dessus ? Dans quelle mesure peut-on dire que les principes d’émancipation que tu prônes entraînent une certaine forme de spiritualité ?
En fait, mes principes découlent de ma spiritualité, c’est pas l’inverse. Je n’ai pas voulu faire un livre axé sur le spirituel, sur ma spiritualité, parce que c’est quelque chose pour moi de très intime. Par contre, il y a des principes de vie, une manière de me comporter, une manière d’interagir avec les autres qui découlent directement de ma spiritualité. Ma volonté de vivre en harmonie, de créer un environnement harmonieux, de créer des relations qui vont pouvoir permettre des échanges, de créer avec les autres un rapport équilibré, ces principes-là découlent de cette spiritualité. Je présente ça comme des conseils de développement personnel alors qu’en réalité pour moi c’est quelque chose de plus complexe. J’utilise le mot « spirituel » mais ce n’est pas forcément quelque chose qui touche à la croyance religieuse, pour moi la spiritualité, c’est quelque chose qui est de l’esprit en fait, ça touche à la façon qu’on a de se penser et de penser les autres. Pour moi, partager ces principes, c’est une façon de partager ma spiritualité mais en la vidant de quelque chose qui va être un peu occulte, un peu ésotérique. Ce sont des principes de vie qui peuvent parler à tout le monde.