En octobre 2020, Chloé Delaume sort son premier album : Les fabuleuses mésaventures d’une héroïne contemporaine. On s’en est entretenue avec elle ici. Composé avec Patrick Bouvet et Eric Simonet, la romancière a créé le disque comme une extension musicale de son roman Le cœur synthéthique, paru en août dernier aux éditions du Seuil. Un trip sonore qui fait voyager dans les 80’s et qui sonde la solitude amoureuse.
Dix chansons, dix « variations qui font écho aux états d’âme d’Adélaïde, héroïne du roman de Chloé ». C’est ainsi qu’est présenté le premier disque de Chloé Delaume sur le site de son label DokiDoki. Adélaïde est le nom du personnage principal du Cœur synthétique qui se retrouve célibataire à 46 ans et en quête d’une nouvelle histoire d’amour. Et c’est dur.
On ne pensait pas pouvoir aller plus loin dans la darkness du sujet. Et pourtant, l’autrice y parvient avec brio dans Les fabuleuses mésanventures d’une héroïne contemporaine. Sur fond de synthé-pop puissante qui sonne bon les années 80, elle chatouille les limites de la lose sentimentale. L’album ne concerne plus vraiment Adélaïde mais toute personne qui se poserait des questions sur les affects qui rythment son myocarde. « Je vous ai raconté l’histoire d’une fille comme les autres mes chéris / Je vous ai tendu un miroir » conclut-elle dans la chanson Perdues d’avance. C’est bien de nous toustes dont il s’agit.
Le disque s’ouvre sur RTT à Trastevere, une douce ballade qui résonne comme les bulles d’un bain moussant pour raconter un weekend en solo foiré où la voyageuse finit « seule et sous lithium ». Dans le morceau Vieillir dit-elle, c’est un corps décrépi par les années qui est chanté et le refrain « Chaque jour tu sais que ça empire / Tu vas finir par en mourir » se répète sur un son de synthé bourdonnant en boucle. La mélodie mélancolique de Cartomancie & cie répond à l’air lumineux de Tinder surprise où il est pourtant question d’un rendez-vous qui a capoté. Quant à Éponyme, c’est sur un beat conquérant et efficace que C. Delaume met un coup de canif aux faux-semblants. Elle y brosse le portrait de ces personnes qui, lorsqu’elles souffrent, « ça ne se voit pas ». On ne vous dit pas tout, écoutez l’album ici, la palette des sentiment convoqués est large.
Les fabuleuses mésanventures d’une héroïne contemporaine, ce sont des sons exquis mais c’est aussi un bel objet. Un vinyle dont la pochette, entièrement en noir et blanc, rappelle une esthétique emo-gothique. Une création signée Ophélie Klère et François Alary, que la romancière connaît de longue date. À l’intérieur, un disque entièrement transparent. Une idée inspirée par une amie comédienne, Élisa Monteil (ndlr – Friction vous a déjà parlé de l’un de ses clip). Et tout récemment, le titre Cartomancie & cie a été remixé par d’autres copains, le duo londonien The Penelopes. L’album est donc aussi une aventure amicale. Elle nous confie : « J’aime bien bosser avec les potes. C’est ainsi qu’on communique le mieux ».