Autorisons-nous une autre politique

Depuis quelques temps maintenant, je rêve de politique. Je rêve d’une autre politique. J’ai l’intime sentiment que nous nous contentons d’un activisme instagrammable et les photos de collage alternent avec quelques mèmes bien sentis. Et c’est sans doute très bien. Mais j’ai suffisamment confiance en nous pour croire que nous ne pouvons pas en rester là. 

Aujourd’hui les débats identitaires et la sacralisation de la parole des concerné.e.s empêchent l’émergence d’idées neuves. Évidemment, il est nécessaire de créer des espaces d’expression pour tous.tes. Evidemment, nous devons penser nos identités. Mais ça ne doit pas être l’alpha et l’oméga de toute pensée politique. 

Je ne dis pas que j’ai la solution, je dis que nous sommes capables de mieux. Je pense à tous les débats qui surgissent tous les quatre matins sur Twitter. Les “bies vs. lesbiennes”, les not all men et les yes all men, les call out et autres procès d’intention aux motivations douteuses et aux finalités incertaines. L’attaque est souvent personnelle et l’on a beaucoup plus de facilités à dénoncer, à distribuer les bons et surtout les mauvais points, qu’à proposer. Nous sommes devenu.e.s incapables de penser et des alliances durables et constructives. Nous construisons nos discours politiques sur le terreau de l’adversité. Je ne dis pas que je fais mieux, je dis que nous sommes, collectivement, capables de mieux. 

Le monde brûle, littéralement, autour de nous. Peut-être est-il temps que nous prenions nos responsabilités vis-à-vis de l’avenir que nous souhaitons. Pour cela, nous devons nous réinventer collectivement et créer les conditions d’émergence de nouveaux discours et de nouvelles complicités politiques concrètes. Les luttes à mener sont nombreuses et il est temps de se saisir des enjeux propres à nos communautés, et même bien au-delà. Je ne dis pas que ce sera simple, je dis que nous en sommes capables. 

Cela veut dire laisser tomber les guerres de chapelle intracommunautaires, en tout cas celles – elles sont nombreuses – qui n’ont aucune finalité stratégique réelle. Cela veut dire aussi, cesser de s’invectiver en permanence, mais plutôt se demander quel monde, nous, en tant que minorités qui subissons le poids du même système d’oppression, quel monde nous voulons voir émerger. Cela ne peut se faire que collectivement. 

Nous utilisons le mot communauté à tort et à travers. Mais sur quoi se fonde cette communauté si nous passons plus de temps à ergoter sur le sens d’un mot, si nous passons plus de temps à penser des punchlines en 280 caractères afin de gagner des followers plutôt qu’à nous rassembler autour d’idées neuves et communes ? Et pour cela, commençons par nous faire confiance et nous traiter avec respect. 

Nous avons oublié ce que c’était, faire de la politique. Ça ne se fait ni sur Twitter, ni sur Instagram. Ça se fait dans la rue, dans la sueur, dans la fougue d’une rage commune.  C’est quand, la dernière fois qu’un texte politique vous a fait vibrer ? C’est quand la dernière fois que vous avez écrit avec vos tripes ?

Alors, écrivons avec nos tripes. Écrivons des textes, des appels à manifester, organisons des rassemblements. Et en attendant de pouvoir être dans la rue, imaginons. Inventons. Mettons de la poésie dans nos tracts. Retrouvons la rage de l’engagement. Ne copions pas, créons.

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