A la base, je voulais sortir le fanzine Vacarme numéro 3 à la Zine Fair de la Queer Week parce que l’année dernière, ça avait été un événement lumineux, riche de belles rencontres et d’échanges assez extraordinaires.
Et puis : advint le confinement.
Alors, parce que tout est prêt, et aussi parce que merde à la fin, on va pas en plus de s’enfermer, verrouiller nos créations sous clé jusqu’à la fin de cet enfer, deux textes du 3ème volume du fanzine seront hébergés par Friction chaque semaine jusqu’à épuisement. Un gros mois, donc.
Comme d’hab, pour celles et ceux qui connaissent pas Vacarme, c’est pas super drôle. Ça parle de sexe, de violences, des deux en même temps, ça parle de dépendances, de travail du sexe, ça parle de santé mentale. Ça parle de choses importantes à mes yeux, de douleurs qu’on partage parfois sans le dire. Ça parle aussi, un peu, d’amour, pour une fois et ça me réjouit de les publier ces textes-là. La version papier sortira à prix libre dès qu’on le fera, nous aussi. Tenez le coup. Et ne lisez que si vous sentez que ça peut vous faire plus de bien que de mal. Ça m’en a fait à moi de les écrire. Et de les offrir.
BPM – Vacarme #3 – extrait 1/9
Playlist : Cassie – Me & u
Et tu as cette montre futuriste bizarre que je regarde parfois quand je tiens tes poignets au dessus de ta tête en arrière sur l’oreiller et que tes yeux sont fermés et que je mords tes lèvres un peu trop fort en surveillant les chiffres qui s’envolent.
58 bpm. Je couvre ton corps avec le mien, j’oublie rien, aucun creux aucun plein, aucun. Je force ma cuisse entre les tiennes et tu résistes un peu mais je sais que c’est pour de faux et toi aussi alors tu te laisses faire et j’aime tellement que tu décides ça.
70 bpm. Je passe ma langue dans ton cou vraiment lentement, du côté gauche, là où ton oreille est vierge des boucles dans lesquelles mon piercing pourrait se coincer. Sans quitter le cadran des yeux. Je mords le haut de ton oreille, j’y dépose mon souffle haletant, je lèche l’intérieur, lentement toujours, doucement.
82 bpm. Je laisse des marques invisibles partout sur toi. De celles qui te feront mal en secret pendant des jours sans qu’il n’y ait jamais preuve que j’étais là, jamais trace de mes dents qui serrent ta peau juste assez. Et pourtant je suis là. Tu sais que je le suis. Tu le sauras plusieurs jours durant, chaque fois que tu te toucheras. Sans moi.
95 bpm. Je chuchote dans ton oreille toute l’envie que j’ai de toi. Des mots propres et d’autres sales. C’est ma langue qui forme ton prénom. Quatre lettres que je sais rendre étonnamment scabreuses. Je sens que ça t’excite et que ça te gêne à la fois. Tu aimes aimer les gentilles filles, je crois. Tu sais pourtant que je n’en suis pas une. C’est surtout ça qui te plait. .
103 bpm. Tu essaies de te coller à moi mais même si t’es fort et que j’aime que tu le sois, tout mon corps t’en empêche et je resserre l’étau de mes mains sur tes poignets, là haut. Je les veux autour de ton cou. Serrer doucement. Ou non. Je décide et tu décides mais on sait plus trop en vrai.
110 bpm. Tu bougeras seulement si c’est ce que je veux. Tu me toucheras seulement si et quand je t’y autorise. Au fond de toi, c’est précisément de ça que tu crèves même si ça te terrifie. Je ralentis et j’accélère et j’attends que tu y sois presque pour arrêter. Torture bien réglée, minutieuse. Recommencer quand je le décide. Jouer.
132 bpm. Je me suis assez amusée avec la montre bizarre. Mais pas assez avec toi. Je veux t’entendre maintenant. T’entendre respirer plus fort. T’entendre te retenir. Enfin, essayer. T’entendre supplier en silence. Jusqu’à ce que. Jusqu’à ce que non. Jusqu’à ce que tu ne puisses plus. Je gagne encore sur toi cette fois.
Ou alors c’est toi ? C’est sûrement toi.
Pour commander les versions papiers de Vacarme c’est par ici. Les expéditions se feront à la fin du confinement.