Hymne à Monique

La poète Don Mee Choi a dit récemment : « il est donc plus important que jamais que nous nous engagions dans le travail non prédateur et oisif de la poésie et de la traduction » et les murs de Marseille lui ont répondu : « ne télétravaillez jamais ».

La devise du deuxième confinement, c’est moins de zoom, plus de masturbation et de manif. Je suis loin de tout, je me sens assez isolée, donc j’écris pour résister encore. J’écris aux copines sur messenger, et ielles se plaignent soit de leur libido morte, soit de ne pas aimer la poésie (ce qui revient un peu au même).

Le mois du solstice d’hiver, dans les traditions païennes du Nord, c’est le moment de faire des sacrifices et des offrandes pour se racheter avec la déesse soleil, se souvenir d’elle qui est si loin, en mémoire d’elle et pour qu’elle revienne. Voici une prière :

Monique Wittig, écrivaine lesbienne - Friction Magazine féministe

Hymne à Monique

Ô Wittig
La nuit noire est tombée sur nous
Des glaciales rafales nous poussent à la maison
ainsi que les politiques de Macron
J’ai péché contre toi
A qui Saphho elle-même
a appris le cunni
et la fusion lesbienne
Pardonne-moi Wittig
puis que je ne peux pas sortir
Et que la cyprine congèle dans mon con

En honneur de toi
Elles sont arrivées par le coucher du soleil
une offrande a été faite
sur internet
à la plateforme Criterion
et à un logiciel de VPN payant
tout en ton nom
Ô Wittig
reine des peuples lesbiens
Toute la Californie
te vénère
Marseille, Bouichette, le 20e arrondissement
Même dans les contrées lointaines
de l’Outre-Rhin
il n’y pas une qui ne connaisse pas ton nom

On a sacrifié un pâté de tofu blanc et de la bière
presque chaude
de la menthe poivrée, du thé grec
et des gyozas fait maison
On s’est échangés des fanzines pornos et, abasourdies
on a crié ton nom
Devant l’écran du projecteur et tous les courts métrages de Barbara Hammer
sauf celui dans le métro new-yorkais
qui était vraiment pas terrible

Douce Wittig
Première Amazone
tous tes noms sont vénérés – Virgile, Monique
Toutes les bouches prononcent l’Oppoponax
Ramène-nous le soleil
de l’été schlag
Quand seins nus
on se baladait sur les calanques.

Partout tu te répands comme un virus
qui guérit et fait sortir de l’hétérosexualité
et même au Brésil on traduit ton nom
Il n’y a point gouine qui ne te célèbre

Feroce Wittig
Recyprine-nous,
sois clémente et
Déconfine-nous

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