« Je transporte des explosifs on les appelle des mots » : anthologie de combat

Au-delà de son titre absolument impeccable, Je transporte des explosifs on les appelle des mots est une anthologie de poésie, publiée aux éditions Cambourakis dans la collection « Sorcières », à côté de laquelle il ne faut pas passer.

Mais pourquoi, dans ma détermination à devenir une « écrivaine » et dans mes tentatives tâtonnantes et semi-conscientes pour comprendre ma situation en tant que femme, me suis-je tournée vers la poésie ?

p. 24

L’anthologie s’ouvre par un long et brillant essai de la poétesse féministe Jan Clausen qui s’intéresse à la vitalité du genre poétique au sein des mouvements féministes aux Etats-Unis dans les années 1970 – 1980. Cet article, écrit par une des concernées, à savoir une poétesse féministe, propose des pistes de réflexions intéressantes sur les plans à la fois politiques et littéraires. On ne peut pas s’empêcher, à la lecture de l’essai liminaire, de se demander pourquoi la poésie n’a pas été un champ littéraire investi par les féministes françaises, plus connues pour leurs activités de romancières que de poétesses.

Je transporte des explosifs on les appelle des mots livre - Friction magazine

Le reste de l’ouvrage est consacré aux poèmes d’auteures plus ou moins connues du public francophone et qu’il est essentiel de découvrir ou de relire, notamment à la lumière de l’essai de Jan Clausen. Audre Lorde, Adrienne Rich, Gloria Anzaldùa & Cherrie Moraga, bell hooks, Dorothy Allison, Robin Morgan, Marge Piercy, Alice Walker, Paula Gunn Allen, Rita Mae Brown, etc. Autant de femmes dont la parole s’est déployée dans un langage, non seulement politique mais également poétique et qu’il est impératif de (re)découvrir. Ce recueil bilingue, qui nous permet ainsi d’appréhender toute la finesse de l’écriture de ces femmes, fait résonner les voix des féminismes dans leur pluralité, celles de femmes racisées, de femmes trans, de lesbiennes, de personnes intersexes…

Ce livre nous touche aussi parce qu’il nous interpelle sur nos moyens d’expression en tant que femmes, en tant que gouines, et sur la possibilité de la diffusion d’une parole poétique façonnée par nos convictions et nos vécus spécifiques. Notre parole est à la fois poétique et politique, elle est, comme le dit si bien le titre de ce bel ouvrage, explosive.

Je transporte des explosifs on les appelle des mots, éditions Cambourakis, collection Sorcières, 02 octobre 2019, 22€

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