On a lu « Kazenchis se tait le dimanche » de Vincent Defait

Kazenchis, c’est le nom d’un quartier d’Addis-Abeba où Mitiku, chauffeur de taxi, va retrouver sa femme, Betty, et ses amis pour célébrer la Pâques orthodoxe. C’est l’occasion pour lui de revoir Solomon, son ami et complice d’enfance. Pourtant, aujourd’hui, tout sépare les deux adultes. Mitiku est devenu le patron d’une entreprise officieuse de chauffeurs de taxi tandis que Solomon, proche des cercles de pouvoir, supervise la construction d’un barrage : symbole de la renaissance de l’Ethiopie. Mitiku est resté fidèle à ses origines, à son quartier, tandis de Solomon est devenu une « gloire nationale ».

« Kazenchis se tait le dimanche » de Vincent Defait
« Kazenchis se tait le dimanche » de Vincent Defait

« Mitiku est rentré chez lui en traversant la ville et l’Histoire avec la même indifférence. La sienne s’agrippait à lui, c’était bien assez. » (p. 20)

Si la narration se déroule sur une journée à peine, c’est toute l’histoire d’une amitié complexe que retrace le roman. Dans cette histoire d’amitié parsemée de détails documentaires, se dessine en creux le portrait d’une Ethiopie en mutation.

« On ne se débarasse pas de son père aussi aisément. Le sien lui collait au crâne et les autres en bavaient. Sa fille, souvent, qu’il trouvait ingrate. Ces caprices, parce qu’il ne pouvait s’agir que de cela, de caprices, étaient bien le fait d’une enfant sans malheurs. À son âge, lui, il regardait son père dépérir, il ne chouinait pas pour une robe. » (p. 119)

Kazenchis se tait le dimanche est aussi une histoire de filiation, c’est aussi une réflexion sur ce que l’on fait de son héritage, mais aussi sur le parent que l’on devient, ou non. Cette fête religieuse célébrée entre ami.e.s et en famille qu’est la Pâques orthodoxe devient aussi le moment pour interroger ce qu’on fait de sa propre histoire et comment on se projette dans l’avenir, notamment en esquissant des interrogations sur le rapport aux enfants.

Kazenchis se tait le dimanche est le premier roman de Vincent Defait et est publié aux éditions Cambourakis. Né à Paris en 1979, Vincent Defait a grandi en Seine-Saint-Denis. Il a débuté comme journaliste pour L’Humanité de 2003 à 2007. Il a ensuite vécu en Côte d’Ivoire, en Suisse, en Éthiopie puis en Inde, où il a travaillé pour plusieurs médias français (Le Monde, Médiapart, La Revue XXI…).

Kazenchis se tait le dimanche, Vincent Defait, éditions Cambourakis, 15€, publié en février 2019

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