« On est les mêmes » : Bagarre revient pour un nouveau projet uppercut

On attendait de pied ferme le retour de Bagarre dont on se souvient l’énorme show au Klub au profit des femmes de chambre en grève de l’hôtel Ibis pour une mémorable soirée organisée par le CLAQ. Cette semaine, le groupe revient avec des pépites qui nous permettront de patienter jusqu’à la sortie du prochain album annoncé pour le printemps prochain. Mercredi 22 novembre, Bagarre renoue avec le club et la fête en organisant une soirée pour lancer un nouveau format mensuel qui aura pour but de récolter des fonds pour des associations. Cette semaine, c’est le Planning Familial qui sera à l’honneur lors d’un événement Les artistes qui viennent ne sont pas payés, ils le feront par engagement militant et amour de la fête. Tout ce qui sera créé ou fait pendant ces soirées sera exclusif et éphémère. La soirée aura lieu à la Casbah dans le 11e arrondissement. Le lendemain, jeudi 23 novembre, Bagarre dévoilera son nouveau single « On est les mêmes ». Pour célébrer ce grand retour, on a décidé de nous prendre la claque qu’on attend depuis 4 ans. Rencontre.

Bonjour Bagarre ! Pour commencer, est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s’est passé pour vous ces 4 dernières années ? 

On s’est d’abord ressourcé. On avait besoin de reprendre notre souffle, de sortir du cycle tournée/album/tournée/album qui est à la fois jouissif mais qui peut finir par t’essorer. On avait pris zéro pauses depuis 2014 et après notre Olympia en novembre 2019, on avait décidé de se donner un break de 3 mois. Et au moment de reprendre, c’était…mars 2020 et le premier confinement. Notre grosse tournée de festivals d’été a été annulée et comme beaucoup d’artistes on a compris qu’on allait pas rejouer avant longtemps. Ça nous a mis un gros coup. Et pour nous, être chacun chez soi n’a pas du tout marché d’un point de vue créatif. On a donc recommencé  à composer au printemps 2021 et aller au studio très régulièrement, à se faire kiffer, un peu gratuitement sur de la musique. Et là on s’est rendu compte qu’on avait accumulé les un.e.s les autres beaucoup de choses et c’est là qu’on s’est mis à se dire qu’on avait de quoi faire un album et surtout qu’on en avait envie. De toute façon on était sorti de toute forme de temporalité liée aux injonctions de l’industrie musicale (toujours plus, toujours plus vite) qui font du mal à la création. Là on a pris notre temps pour revenir avec le disque dont on serait fier.e.s. Et à partir de là on a bossé à fond.

Vous faites votre retour avec « On est les mêmes », un premier single très punchy. Vous y critiquez le conformisme ambiant mais c’est aussi un morceau qui véhicule un message plus positif. Est-ce que vous pouvez nous en parler ? 

Oui, derrière l’ironie, il y a en fait une tendresse dans ce slogan “On est les mêmes”. 

« On est les mêmes » doit aussi être vu positivement, c’est un appel à regarder ce qui nous rassemble plutôt que ce qui nous divise, un appel à faire ensemble.

On est dans  l’autodérision, l’autocritique. Le ton est volontairement caustique car on s’accuse les uns les autres de tous les défauts qu’on a toustes plus ou moins aujourd’hui. On est dans une société où tout le monde critique tout le monde alors qu’au fond tout le monde a les mêmes failles, limites et faiblesses.

D’une certaine manière c’est par notre petitesse , nos râleries , nos doutes existentiels qu’on peut se réunir, se sentir faire partie d’un tout qu’est l’humanité. On est tous foireux mais bon l’humanité n’en est que plus touchante.

© Sarah Makharine

Vous êtes connu·es pour vos engagements au profit de plusieurs causes qui vous tiennent à cœur. Quelles sont les luttes qui vous animent aujourd’hui ? 

Nous sommes juste des artistes alertes et comme beaucoup de monde il y a des choses qui nous révoltent ou qui nous donnent envie de nous battre. Que ce soit la question de l’urgence écologique, le féminisme, la question des luttes pour les droits des minorités, la lutte contre les violences policières, contre toutes les formes de discriminations ou contre les inégalités sociales qui s’accroissent, la lutte pour les droits des personnes exilées, la lutte pour une société pour une plus ouverte, inclusive, tolérante. Nous avons une voix audible en tant que groupe qui a une petite renommée, et on a souvent pensé qu’on avait surtout des moyens concrets qu’on pouvait utiliser : on a souvent pu organiser des soirées en levant des fonds au profit d’associations ou en les invitant pour faire de notre CLUB un espace politique (le BAAM, le vestiaire des migrants, Accptess-T, Consentis). Nous on change pas le monde, mais on peut aider ceux qui le change à le faire.

D’ici la sortie de l’album prévue en mars, vous allez organiser des soirées, dont la première est le 22 novembre au profit du Planning Familial. Vous pouvez nous expliquer le concept ? Pourquoi le choix de cette association ? 

C’est une association féministe et d’éducation populaire, le Planning familial milite pour que chaque personne puisse avoir une vie affective et sexuelle épanouie, lutte pour le droit à l’éducation à la sexualité, à la contraception, à l’avortement, à l’égalité de genre et combat toute forme de violences et de discrimination.

C’est une association très active sur les questions de défense des minorités de genre et de défense des droits des personnes Trans. On admire leur action, leur travail militant et cette association est souvent menacée financièrement justement à cause de ses positions. 

Dans quelle mesure les choix musicaux, qui aboutissent à des morceaux plutôt festifs, permettent-ils de porter les messages qui vous tiennent à cœur ?  Comment est-ce que vous travaillez en tant que groupe ? 

Pour le prochain album à sortir au printemps, on a travaillé un peu différemment. Avant quand l’un.e de nous arrivait avec un thème dont il voulait faire une chanson, iel allait généralement la chanter. Là on a mutualisé nos histoires, on chante pas forcément ce qu’on écrit et a pas forcément écrit ce qu’on chante. On a d’abord commencé à chercher des mélodies sur des prods, puis à mettre les paroles de chacun.e en fonction de ce que ce que dégageait les démos elle mêmes. Ca été assez naturel d’avancer et de façon encore plus collective qu’avant.

Pensez-vous qu’il soit de la responsabilité des artistes de s’engager dans le contexte social et politique actuel ? 

On a une voix et nous on a décidé de l’utiliser comme on peut pour défendre les valeurs qui nous semblent hyper importantes alors qu’on est dans une société qui semble aller parfois vers une ambiance de plus en plus réactionnaire, crispée et intolérante. 

Justement, quel regard portez-vous sur l’actualité ? 

En ce moment c’est ultra dur de suivre l’actualité sans être totalement démoralisé. Il y a peu de raisons de se réjouir. Sur notre disque précédent 2019-2019 était collé à l’actualité et là, on a dû s’en distancer un peu dans nos nouvelles chansons. On est allé chercher plus dans l’intime, dans l’amour, pour continuer à espérer. Et au final on s’est rendu compte qu’à travers nos histoires personnelles, nos chansons assez biographiques on recoupait en fait de grandes questions sociétales sur le genre, les questions de discriminations, les angoisses liées à ce la société dans laquelle on vit génère. On est comme des éponges et nos chansons, même quand on croit s’éloigner de l’actualité sont en fait toujours des réceptacles de la façon dont le monde nous traverse. 

Mercredi 22 novembre, La Casbah, 75011, 21h-02h

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