Madame Rap est le premier site entièrement consacré au rap au féminin. Éloïse Bouton et son acolyte Emeraldia Ayakashi sortent, en ce 25 novembre 2016, journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, une compilation rap engagée et féministe. On a rencontré Emeraldia Ayakashi, l’une des deux fondatrices du site, qui signe l’un des morceaux de la compilation.
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Friction : D’où vous est venue l’envie de réaliser une compilation contre les violences faites aux femmes ?
En France, une femme meurt tous les 3 jours sous les coups de son compagnon, et toutes les 7 minutes une femme est violée.
L’année dernière, nous avions sortie une compilation Contre Coups, à l’initiative d’ Eloïse Bouton contre les violences faites aux femmes accompagnée d’une campagne de crowdfunding sur Ulule qui a dépassé son objectif de 135 %. Tous les bénéfices générés ont été reversés à l’Institut en Santé Génésique (ISG), centre basé à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines), qui accueille et accompagne des femmes victimes de toutes formes de violences (harcèlement moral, viol, inceste, violences conjugales, harcèlement au travail, excision…).
Les violences faites aux femmes n’est pas l’apanage d’un seul pays, elles sont graves et répandues dans le monde entier.
Nous ne pouvons pas vivre dans une démocratie sans affronter et condamner les violences contre les femmes et les assassinats dus à leur sexe, ce n’est pas un problème privé, c’est une problématique qui fait partie des violations des droits humains.
Nous avons donc décidé avec Madame Rap de poursuivre nos engagements à cette cause avec 11 rappeuses du monde entier qui se mobilisent en musique pour combattre ce fléau sociétal. Nous défendons les droits des femmes, dans leur globalité, avec la sortie de notre compilation : « Still I Rise », titre du célèbre poème de l’écrivaine et militante américaine Maya Angelou, décédée en mai 2014, qui vise à célébrer l’empowerment au féminin.
Ces rappeuses internationales sont là pour dénoncer viols, meurtres et violences et surtout, pour que soient enfin appliquées les lois qui punissent de tels actes, dans les pays où ce n’est malheureusement pas toujours le cas.
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Madame Rap n’a jamais caché son engagement féministe, est-ce que cette sortie marque une nouvelle étape dans votre démarche?
Loin de le cacher, nous en sommes même très fières !
Pendant longtemps, il était difficile de s’affirmer féministe sans affronter les moqueries, clichés et les critiques. Aujourd’hui, grâce à internet, aux Tumblr et à certaines pages Facebook, dénoncer les attitudes sexistes est devenu plus « populaire ».
Nous nous engageons de plus en plus pour les droits des femmes, en ces temps difficiles pour elles (politique, social, sexisme, harcèlement, égalité professionnelle …)
Cette compilation marque donc naturellement une nouvelle étape pour Madame Rap dont la mission est de recenser des rappeuses du monde entier et célébrer le rap, les féminismes, les LGBTQIA, l’art et les cultures urbaines.
Actuellement sur le site, 80% sont des rappeuses internationales, pour donner un plus grand écho à la cause, une autre image du rap, loin des clichés stéréotypés sur ce moyen d’expression, parler d’égale à égal avec les hommes, nous allons organiser un « Madame Rap Tour », qui commencera par les États-Unis.
Éloïse Bouton donnera des conférences sur la place des femmes dans le hip hop, à travers les sujets que nous traitons régulièrement sur notre site et nous intègrerons les artistes avec qui nous sommes en contact et moi-même dans le cadre de DJ sets dans des festivals, des soirées bars/clubs, des centres culturels etc.
Et à moyen terme nous préparons la mise en place d’un label, nous vous en dirons plus courant 2017!
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Comment s’est faite la rencontre avec les autres artistes ?
L’espace d’expression que représente internet, et les initiatives spontanées qu’il permet d’héberger, nous a permis d’être en contact régulier avec les artistes, que nous avons interviewées sur le site et contactées ou recontactées pour faire partie du projet.
Avec Eloïse, nous avons chacune nos « targets », personnellement c’est KT Gorique, que je suis depuis des années. Championne suisse, et du monde de rap au End of the Weak, qui a joué dans le film de Pascal Tessaud « Brooklyn », l’âme de son flow et la poésie de ses instrus me parlent beaucoup.
Et A2N, que j’ai rencontrée il y a quelques mois dans le cadre du tournage d’un pilote pour émission de radio pour Madame Rap, qui envoie déjà du lourd et qui pour moi va peser dans le game en France.
A2N et Valore se sont rencontrées pour la première fois à Paris dans le cadre de la soirée « You Can’t Play With My Yo-Yo » organisée par Madame Rap. Quelques jours plus tard, les deux MCs ont enregistré le duo inédit » Women with a voice » composé et produit par moi-même et single de la compilation « Still I Rise ».J’ai un gros crush sur Reverie, mais je suis fan de toutes les rappeuses présentes sur la compil : Rebeca Lane (Guatemala), Valore (US), Phlow (Nigéria), Rell Rock (US), Red Shaydez (US), Justina (IRAN), et le collectif REYKJAVIKURDAETUR originaires de mon pays de cœur l’Islande !–
Ce sont des thèmes durs, dire non à toutes formes de violences faites aux femmes doit être une évidence pour tout un chacun. Si ce n’est pas une sœur, une cousine, c’est une femme, une maman qui est violentée, ce sont des situations insoutenables qui nous interpellent toutes et tous.
En échangeant avec les artistes , nous avons découvert sans surprises que ces sujets font déjà partie du quotidien des rappeuses, à travers leurs vies personnelles, ou celle de leur famille et amies.
La mobilisation a donc été rapide.
Nous entamons un travail de sensibilisation, de longue haleine et difficile, armées de micros et de flows, et nous espérons bien faire bouger les choses et sensibiliser le grand public pour qu’il y ait une prise de conscience véritable et collective.
Nous allons d’ailleurs faire un appel à freestyle, afin de prolonger sur l’instru de « Still I rise », pour élargir les possibilités pour toutes les rappeuses qui le souhaitent de s’exprimer sur le sujet, nous publierons tous les freetyles reçus sur notre page Soundcloud !
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Tu signes toi-même l’un des titres de la compilation, tu peux nous en dire un peu plus ?
J’ai commencé à mixer du hip hop à 12 ans, mais je ne suis pas figée sur un genre musical. Ce que j’écoute et m’influence est très varié, j’essaye de créer des atmosphères et de faire ressortir des émotions ou celle des situations que j’ai envie de retranscrire. Je compose ma musique en ayant des images en tête et essaie de reproduire l’impact visuel et émotionnel en impact sonore. Quand je compose, je m’appuie sur quelque chose que tout le monde va ressentir
Dans une nouvelle étude, les chercheurs de l’Université de New York ont isolé les rythmes du cerveau qui peuvent se coordonner avec la musique. L’écoute de la musique renforce les mécanismes oscillatoires conçus pour le traitement de la structure temporelle dans la musique et peuvent aider dans la thérapie comme support d’aide psychologique et guérison des traumatismes.
Pour » Still I Rise » je me suis inspirée du flow de Maya Angelou récitant son poème. Je l’ai composé après avoir regardé le documentaire « Basta avec la violence contre les femmes », et après 20 minutes, cela a commencé à bourdonner, puis la mélodie est sortie, les meilleures mélodies sont celles dont vous vous souvenez – elles reviennent à vous. Vous vous réveillez juste le matin et elles sont là !