Vers l’infini et AD ASTRA. On a discuté avec Maud Geffray.

On avait gravé l’heure et la date d’interview dans notre agenda. Rendez-vous dans un troquet du 19e arrondissement, au bord du Canal de l’Ourcq. La météo est assez clémente pour qu’on se pose en terrasse. On a voulu se la jouer professionnelle (lol) et arriver un chouia en avance. Mais Maud Geffray est décidément plus pro et déjà installée. Les cafés sont servis, on discute, c’est quand même sympa de se retrouver. Puis on ne peut pas se retenir, on la félicite pour son petit bijou électronique, Ad Astra, nouvel album qui sort le 20 mai. On avait préparé des questions dans l’ordre mais le shot de caféine faisant effet et le pur plaisir de parler musique chamboulent tout. Entretien in medias res. Décidément, les locutions latines…

Nadiam’s : Ad Astra comprend 12 morceaux dont 3 duos. Comment tu as pensé l’album ?

Maud Geffray : J’avais composé énormément de morceaux. J’en ai viré certains, conservé d’autres. J’étais vraiment en jachère. Puis je me suis resserrée sur certains d’entre eux que j’ai peaufinés. Je les ai fait écouter à Krampf, avec qui j’ai produit l’album. Je n’aime pas travailler seule du début à la fin. À un moment, tu es obligé·e d’avoir des retours sur ce que tu fais. Parallèlement, je réfléchissais déjà aux duos et à qui j’allais les proposer. J’avais pensé à pas mal de monde pour finalement revenir à quelque chose de plus intime. Je me disais que le langage serait compris tout de suite. Pour Julia [ndlr, aka Rebeka Warrior], ça a été d’une simplicité. Quand je lui ai envoyé la musique, en 4 jours elle avait écrit le texte.

Ad Astra, le nouvel album de Maud Geffray

Pour les duos justement, tu as donc fait appel à Rebeka Warrior mais aussi Krampf et Koudlam. Comment se sont passées ces complicités ?

Avec Rebeka Warrior et I fall at 5 [découvrir le clip ici], ça a été super rapide ! Je lui ai fait suivre le son en la laissant totalement libre sur les paroles. Elle m’a surprise en revenant vers moi avec un texte sur nos origines [ndlr, toutes deux viennent de St Nazaire], nos insomnies, nos difficultés communes, les choses dures qu’on a vécu et qui nous rassemblent. C’est ce qu’elle avait envie d’écrire et j’ai trouvé que c’était un magnifique message qu’elle m’envoyait. Quant à Koudlam, je voulais l’amener ailleurs que dans ses territoires habituels et que ça sonne comme un rap aérien du futur.  Je lui ai donc proposé Royal Bellies qui change des sons qu’il travaille dans ses projets.

Et Krampf ?

Le morceau Plur est en réalité sorti il y a un an, sur une compilation. Comme un cadavre exquis musical, je l’avais commencé puis j’avais proposé à Krampf de le terminer. Ce à quoi il avait répondu « Oui, grave ! ». On l’a finalement fini ensemble, il l’a produit et ça s’est hyper bien passé. C’est là que je lui ai proposé de produire l’album. Ce à quoi il a répondu « Oui carrément ! ». Plur, ce sont les prémices d’Ad Astra.

On est rentrée dans le vif du sujet mais, initialement, je voulais commencer l’entretien par un constat. Ad Astra est ton 22e projet musical…

Putain… La vache !

[RIRES] Donc 22e projet musical en 20 ans d’activité. Qu’est-ce que ça fait ?

Ça fait plaisir de voir que ce n’est pas qu’un sport de jeunes et de durer dans ce métier. J’aime la richesse de tout ce que je peux faire dans la mesure où il ne s’agit pas uniquement d’une succession d’albums. Il arrive que ce soit dur et qu’on se dise, parfois, que c’est peut-être le moment d’arrêter. Mais il y a toujours quelque chose qui vient nous rattraper.

Tes créations sont très diverses. Il y a tes albums solo, Scratch Massive, des bandes originales de films, des collaborations…  Tu es à l’initiative de toutes ces aventures musicales ? Ou viennent-elles à toi ?

C’est un mélange des deux. De toutes façons, la vie est faite de hasards permanents. C’est intrinsèquement lié à ce que l’on vit. Et la musique, c’est ma vie. Les projets s’en nourrissent. Les miens partent d’envies et de désirs. Les artistes avec lesquel·les je travaille me donnent souvent envie.

Pourquoi avoir intitulé l’album Ad Astra ?

Je suis tombée sur cette citation Ad astra per aspera qui signifie Vers les étoiles au travers des difficultés. Il résume bien l’album, les thématiques que j’y aborde et que j’insuffle dans la musique. Puis j’ai découvert que c’était le titre d’un film de James Gray et qu’Elon Musk avait donné le même nom à ses écoles ! Tout cela au même moment. Je me suis dit « wow, c’est chaud ! ».

Comme quoi, tout était écrit dans les étoiles.

[RIRES] Oui mais pour moi, c’était plié, c’est ainsi que je l’avais visualisé. Ce qui me plait dans cette expression aussi, c’est l’espoir. Rebeka Warrior évoque justement cette lumière que l’on recherche toutes les deux dans I fall at 5.

I FALL AT 5 – Maud Geffray feat. Rebeka Warrior – Crédit photo Partizan

Il y a toujours une nécessité dans un acte créateur. Quel est celui d’Ad Nastra ?

Je voulais donner une suite à Polaar [ndlr, album sorti en 2017]. Il avait été fait en Finlande, en plein hiver. À l’époque, j’avais besoin d’un repli et de trouver de la chaleur dans quelque chose de sombre. Avec Ad Nastra, j’avais envie de ré-ouvrir les portes. Très vite, j’ai pensé mettre le titre All around me en ouverture de disque. Il sonne comme un début d’histoire.

Et tu voulais raconter quelle histoire ?

Dans All around me, il y a tout un travail sur des voix fantomatiques. Je voulais laisser ces fantômes derrière moi. C’est une rampe de lancement très douce. Le matin, quoi. Les paroles sont rassurantes et s’étirent tout au long de l’album avec des moments lumineux, d’autres plus raides. Le dernier morceau, Dark Paradise, c’est celui que tu écoutes dans le noir, tout·e seul dans ta chambre. Quand on est seul·e avec ses démons. L’album est une journée qui s’étale, c’est une histoire sensitive.

Ta voix est très présente dans ce nouveau projet. Tu chantes sur tous les morceaux.

C’est drôle, je ne l’avais pas réalisé. Je ne voulais pas être uniquement dans l’expression musicale. J’avais envie de mots et de textes. Ils peuvent être mis en avant mais aussi parfois en retrait. C’est ce qui donne le côté mélancolique à Ad Astra. Puis ça permet de rassembler l’ensemble des titres. Entre Don’t need qui est très dancefloor et Way Out qui est plus sombre, la voix mélancolique leur donne une veine commune.

Quelle forme prendront tes lives ? Car on t’a toujours vu derrière des platines mais rarement derrière un micro.

C’est justement le travail du moment. Il existe une nite version de Fallin’ [ici, la version album] et c’est ce vers quoi je tends pour les concerts. Je retravaille les morceaux pour la scène, comme nous le faisons d’ailleurs avec Scratch Massive. Je garde l’ADN tout en changeant certains éléments pour les faire vivre en concert. 

Et on te verra chanter du coup.

Ouais ! L’idée est qu’il n’y ait plus que la musique électronique et ma voix. C’est ce que je me fixe. Ça me fait peur mais il va falloir que j’y aille.

ÉCOUTER L’ALBUM AD ASTRA

Et notre chronique musique arrive tout bientôt… En attendant, rien à voir mais chauffez bien les dancefloors.

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