On est samedi, hier je suis rentré tôt, une petite pièce en costume au Dejazet, une pizza avec un pote, et puis voilà, parce qu’aujourd’hui, c’était politique, c’était gazeux et solide à la fois. Solide comme les matraques et gazeux comme tu sais quoi. La manif, c’était quelque chose : c’était encore une fois la bataille dans Paris. Pas uniquement une bataille contre les flics, c’était aussi une bataille contre celleux qui croient qu’on peut se contenter de marcher pour que le climat arrête de s’emballer. Bon j’avoue, j’ai passé la fin d’après-midi à rager contre le manque de radicalité des non-violents et du manque d’à-propos des camarades offensifs. Peut-être que c’était pas le moment de faire l’émeute, les amis. Ouais mais en même temps c’est jamais le moment, avec eux. Classique discussion de fin de manif avec les potes.
Tu sais, on va passer directement de l’odeur des lacrymos à l’odeur du poppers, ça va déménager, ce soir, c’est la Flash, je nous connais, une fois qu’on sera dans le club, il n’y aura plus rien d’autre que la techno et l’estomac qui bouillonne. On avait tout prévu, on était allé chez le marchand de taz après la manif pour pas les avoir au moment des contrôles, on avait trouvé chez qui on allait boire les premières bières en se montrant sur nos écrans les conquêtes de la semaine, l’histoire de la manif, on l’avait déjà oubliée, on en reparlerait plus tard. L’important c’est de savoir si machin à revu truc, si tu trouves beau le mec en face, si tu savais que le mec de l’autre fois était en couple avec une meuf ? Tout était prêt. Et vers 23h30, genre quand on mettait nos pompes et que certains se pailletaient la gueule, que d’autres se poudraient le nez, Oscar m’a tendu son téléphone et on a vu la publication Facebook. Préfecture. Flash annulée. Club fermé administrativement. Et pour un bout de temps en plus. Les bâtards. Ils savent pas ce qu’ils font.
Bon, dans ces moments là, il y a toujours la Java. Elle fait le taf. Est-ce que c’est gay-friendly ou c’est encore un truc d’hétéro-beauf comme la dernière fois ? Non, mec, il y a de l’écriture inclusive dans la description, c’est forcément gay friendly. Ça nous fait tous marrer, et on marche vers la Java. Ce qui est bien à la Java, c’est que tu peux escalader la barrière qui sépare le fumoir de la file d’attente pour rentrer gratos. Ne le dites pas, c’est un secret.
Dans la Java, c’est pas top, sauf vers 4 heures, quand il y a quelques gars qui arrivent du Têtu festival. Enfin parmi ces quelques gars, il y a Sacha. Le mec est jamais seul, c’est compliqué de lui parler, alors Oscar prend les devant et l’invite à notre table. Il se pointe avec son pote, on discute quelques minutes et on passe le reste de la soirée à s’embrasser avec Sacha. Dans le métro du retour, Sacha m’annonce qu’il bosse pour un Labo Pharmaceutique et qu’il a, dans son portefeuille, une carte d’adhérent à LREM. Ouais on peut pas tout avoir. De toute façon la fête est finie.
À la semaine prochaine.