Gamine fait sa « boum féministe »

Gamine est un collectif de trois personnes, Anastasia (Soeur), Serena (dj CocoDisko) et Joanna, toutes les trois passionnées par le monde de la nuit. Par exemple, Serena et Anastasia co-animent une émission radio sur la Club Culture sur Radio Né. Tout est parti de l’envie de lancer leurs propres soirées, en développant une dimension féministe, pour pallier un peu le manque de meufs aux manettes dans la nuit à Paris. Pari tenu puisqu’après une première édition au Pavillon des Canaux et une deuxième survoltée au Hasard Ludique, le collectif Gamine revient pour une boum artistique et féministe le soir de la Marche des Fiertés 2018 de Paris, au bar lesbien le So What de 20h à minuit. De quoi piquer notre curiosité. On a cherché à en savoir plus.

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Friction : Comment vous est venu le choix du nom de votre collectif?

Joanna : Lors d’une soirée on a commencé à énumérer les qualificatifs dégradants dans nos vies… Et on a décidé de s’appeler Gamine afin de se réapproprier les dénominations négatives patriarcales qu’on peut entendre, qui sont insultantes et infantilisantes pour les femmes, et d’en faire quelque chose de « positif ». Comme le dit la description de notre collectif, les gamines et autres pisseuses investissent le dancefloor pour vous montrer qu’elles sont fortes et qu’elles ont le pouvoir !

Gamine c’est celle qui veut que les inégalités hommes/femmes disparaissent dans le club, devant et derrière les platines. Gamine c’est pour toi qui n’en peux plus des gros lourds en soirée. Gamine, c’est aussi et enfin, pour toutes celles et ceux qui aiment jouer avec leur look, sans trop se prendre au sérieux.

C’est quoi une “boum féministe” ?

Anastasia : Le terme de « boum » correspond bien à ce qu’on souhaite créer: un espace ludique et bienveillant avec beaucoup de paillettes, du maquillage, des vêtements qui brillent et des looks qu’on oserait pas ailleurs. Il y a aussi la musique : on propose toujours une sélection musicale spéciale Gamine en début de soirée, avec des classiques dancefloor de tous les styles et de toutes les époques. Par contre l’esprit sympa de la boum s’arrête si on fait face à des comportements sexistes/LGBTI-phobes. On essaye de rester aux aguets pour détecter tout comportement déplacé et intervenir. Le but c’est de créer un espace safe pour les personnes, en particulier pour les femmes, qu’elles se sentent libres de s’habiller/danser/agir comme elles le veulent.

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Pourquoi avoir choisi de l’organiser le soir de la Pride ? Dans quelle mesure est-ce que vous vous sentez proches des revendications des LGBT+?

Serena : nous organisons une soirée le soir de la Marche des Fiertés de Paris à la demande de Marie, programmatrice du bar le So What, et ça nous a tout de suite super intéressées. Ensuite, en tant que lesbienne (et membre d’associations), je me sens évidemment « proche » des revendications des personnes LGBTI+ !

Et cette année, il y a malheureusement encore de quoi s’insurger sévèrement : entre la PMA qui peine à être légalisée pour les personnes ayant un utérus (seules ou en couple), les mutilations sur les personnes intersexes, les discriminations et le manque de droits pour les personnes trans, les politiques racistes, les lgbtphobies qui ont augmenté de 15% en 2017, les diminutions de subventions pour les associations de terrain luttant contre les violences faites aux femmes, et les récupérations du gouvernement actuel… Que de choses « réjouissantes » contre lesquelles nous devons rester mobilisé-e-s….

Anastasia : Je suis pour un féminisme intersectionnel et donc inclusif. J’essaye de penser mon engagement féministe à travers des discriminations qui ne me concernent pas forcément : LGBTI-phobie mais aussi racisme, classisme, validisme, âgisme … M’intéresser aux revendications LGBTI+ en tant qu’alliée m’a permis de me déconstruire sur de nombreux sujets, et surtout au niveau des normes de genre (et notamment de l’ « hétérosexualité normative »). En fait, ça a renforcé mon engagement dans la lutte féministe inclusive.

Vous nous parlez un peu du programme de la soirée ?

Serena : la soirée sera une soirée Gamine typique, avec une maquilleuse et un dressing pour que le public se transforme sur place !… Une illustratrice, Léa Soulami, initiera une fresque participative où le public pourra laisser libre court à son imagination en réalisant des dessins et slogans féministes/militants… De plus, une artiste, Hélène Hulak, tiendra un stand de décalcomanies « pop » avec des flash « décalco » créés pour l’occasion (représentant Ellen Page, Katelyn Jenner, Laverne Cox, Princesse Nokia, Michèle Visage, Paul Preciado, Audrey Lorde, Eileen Miles, Virginie Despentes, The L word…). Toutes deux vendront également leurs créations. Enfin, on a voulu monter une petite exposition de portraits de personnalités LBTI+ qui ont compté dans l’histoire du mouvement féministe et LBTI+, pour pallier un peu l’invisibilité gouine dans l’histoire, et dans un Marais principalement gay.

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Enfin, on va aussi décorer le bar avec des photos de pride emblématiques (et de Stonewall), afin de rappeler leurs racines historiques révolutionnaires, comme un petit contrepoint à notre niveau au mot d’ordre de l’Inter-LGBT de cette année.

Pourquoi avoir choisi le So What pour ce troisième événement?

Serena : Marie, la programmatrice du So What, nous a proposé d’organiser une soirée au bar lesbien le So What pour la Pride et on a tout de suite dit oui !

Depuis quelques mois, le So What est divisé en 2 lieux (en un seul) : La Boulange’ qui accueille concerts et événements culturels en semaine, et le so what qui reste un bar lesbien historique à partir de minuit.

Le So What avec le 3W kafé sont les seuls bars lesbiens à fermer à 4/5H le week-end et à proposer, au cœur de la nuit, une alternative fixe – en quasi non mixité lesbienne/bie – aux clubs.

Je pense qu’il faut, selon les possibilités de chacun-e, soutenir et fréquenter les bars lesbiens, car il y a un manque criant de bars/lieux lesbiens à Paris (comparé aux bars/lieux gay – je dirai environ 5 bars lesbiens contre une centaine de lieux gays), du coup c’est important d’apporter un soutien matériel à ces bars lesbiens (si ceux-ci ne sont pas oppressifs, évidemment), en allant y boire des verres de temps en temps !

Et si vous deviez nous recommander trois sons pour nous faire patienter avant la fête ?

Anastasia :

Joanna :

Serena :

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