J’ai organisé mon anniversaire dans mon appartement. Un simple repas entre amis. Il y avait Oscar, Pierre, Pauline, Carole, et quelques autres amis dont je n’ai jamais parlé ici. Nous mangeons, puis nous dansons maladroitement en buvant des cocktails à base de rhum. Oscar passe les classiques, très très fort, et certains prisent déjà la coke qu’on vient de nous livrer sur le plan de travail de la cuisine. J’ai réussi à convaincre tout le monde de prendre une place pour cette soirée techno, dans un club inconnu du côté de Saint-Denis.
Vers une heure, je reçois le classique sms de mon voisin, qui se termine par le smiley qui pleure. C’est toujours plus ou moins à la même heure que ça arrive. Pierre doit partir, il a un autre anniversaire.
Arrivés dans la file d’attente, je constate : c’est l’un de ces clubs où l’on te fouille jusque dans la petite poche du jean. L’un de ces clubs qui a une politique particulièrement stricte en matière de drogues. Ce genre d’insupportable hypocrisie des patrons d’établissement qui font la chasse à l’entrée, alors que la musique dure jusqu’à 7h et qu’ils feraient mieux de mettre de l’eau fraiche aux toilettes pour limiter les risques.
Nous sommes 7, et nous entrons dans cette grande salle en sous-sol, et nous gobons en même temps les pilules. Sur les côtés, il y a de vastes canapés léopard et le dancefloor est éclairé par de la lumière noire. Non mais sérieusement, de la lumière noire…
Le techno est spéciale, rapide, c’est pas vraiment ce que j’imaginais. En réalité, nous passons notre temps dans une alcôve à discuter sur les canapés en buvant de grand verres d’eau tiède remplis au robinet.
L’heure tourne, nous dansons, nous ondulons, nous nous enlaçons, et nous perdons la trace de Pauline, partie embrasser un garçon dans le fumoir. La vague finit par opérer son relfux, nous passons la saluer avant de nous engouffrer dans les voitures qui nous ramèneront chez nous.
Quelques jours plus tard, à la Queerfood de soutien au Rojava, je recroise Pauline. Nous sommes à la même table, et je demande à Pauline comment s’est terminée l’histoire avec le gars du fumoir :
« Tu vas me prendre pour la dernière des connes, mais vers 6heures et demie, il m’a dit qu’il allait pisser, j’en ai profité pour m’enfuir, parce que j’avais peur de ne plus être excitée avec tout cet ecsta qui redescendait, et puis une flemme incroyable de finir la nuit avec lui. Donc j’ai déserté la zone, aussi vite que possible, et j’ai couru vers la première station de métro.
—T’as filé à l’anglaise.
—Je suis partie en loucedé. Je suis pas fière. Surtout qu’en arrivant chez moi, j’ai été prise d’un doute affreux. Il était quand même mignon, le gars, sympa et tout et tout. Putain je regrettais déjà. Et voilà, ça fait trois jour que je me demande comment je vais pouvoir remettre la main dessus. La seule chose que je sais, c’est qu’il travaille chez BFM et qu’il s’appelle Antoine.
—Ca ne fait pas beaucoup…
—Presque rien, tu veux dire ? Il ne me reste plus qu’à essayer d’imaginer à quelle soirée il va aller la semaine prochaine pour essayer de retrouver sa trace. »
Un mec de BFM. Pauline avec un mec de BFM.
« Tu vas pas avoir une relation suivie avec un mec de BFM quand même? T’as pas d’honneur ou quoi?
—De toute façon, le destin a décidé, je le retrouverai jamais. »
A la Queerfood, les tables sont partagées. La fille qui est à côté de moi a tout entendu. Elle dit :
« Mon petit frère est en stage chez BFM, il peut pas les blairer, je suis sûre qu’il peut retrouver ton gars.
—Génial. S’il réussit, je couche avec ton petit frère.
—T’as pas plutôt envie d’écumer tous les clubs techno pour remettre la main dessus ?
—Je déteste la techno.
—Pourquoi tu viens en club alors?
—Pour pouvoir prendre de l’ecstasy.
—Tu prends des taz en écoutant Céline Dion, arrête de mentir. »
Deux jours plus tard, je suis à vélo, je fonce sous la pluie vers le bar de la rue de Belleville, j’écoute à fond le dernier album de Johnny Montreuil, quand mon téléphone sonne. Je décroche avec les écouteurs : C’est Pauline.
« Le petit frère de la meuf de la Queerfood a retrouvé mon Antoine. Le mec s’est quand même coltiné tout l’annuaire machin chose à m’envoyer les photos de tous les Antoine… Bref j’ai son contact, je suis sur son Insta. Je l’ajoute ?
—Fais comme tu veux, mais surtout raconte-moi.
—T’es au courant pour la Flèche d’Or ? Ca part en squat. La Maison des Peuples. C’est comme ça que ça s’appelle maintenant. »
Achille sur Twitter : @achillemtrl