DJ Schnake est une jeune DJ et productrice française, talent émergent de la scène parisienne révélée par la Darude en 2022. Véritable showgirl, DJ Schnake a une identité musicale bien à elle : la « chipiecore ». On l’a rencontrée peu avant son passage au Rex au début du mois et on attend avec impatience de la voir au Cabaret Sauvage le 24 février prochain.
Hello, peut-être peut-on commencer par le début : qui es-tu ? est-ce que tu peux revenir sur ton parcours ?
Hello la team ! Je m’appelle Carolyne avec un y, j’ai 25 ans. J’ai découvert la musique électronique et le mix à l’anniversaire des 3 ans de la Darude à la Machine du Moulin Rouge en décembre 2021, et ça a été la révélation. Je n’en ai plus raté une seule, et j’ai appris à mixer avec le type de son que j’entendais là-bas : hands up, trance, happy hardcore, plein de remix de sons pop ! 6 mois plus tard en juin 2022, j’ai gagné le dj contest pour jouer à la Darude à Rouen, ma toute première date. Suite à ça, DJ Kwame et Die Klar ont tenté le pari de me confier l’ouverture de la Darude de septembre 2022 à Paris cette fois – une opportunité juste énorme pour une débutante et une prise de risque pour eux aussi il faut le dire ! Mais ça s’est super bien passé et trois semaines plus tard ils me rappelaient pour jouer au Transbo, à Lyon, et la mayonnaise a pris…J’ai énormément travaillé mon mix et ma DA, on m’a proposé de plus en plus de dates, la team Darude a continué à me faire confiance, jusqu’à me faire faire le warm up de leur Boiler Room en juin 2023 à Paris, pile un an après mes débuts – complètement dingue ! Enfin, histoire de boucler la boucle, je viens tout juste d’intégrer Magnetiic, l’agence de la Darude ; en route vers la suite de l’histoire ! Bref, believe, croire en vos rêves.
Ton nom de scène est une référence à la fois au DJ Snake qui est un DJ qui a beaucoup de succès commercial mais c’est également une référence à la « schneck», la chatte quoi. Alors, humour, féminisme, autodérision, les deux ?
Clairement les deux ! Au risque de mettre un véritable coup de pied dans la fourmilière, j’adore l’humour.
Plus sérieusement, je suis une grande fan de jeux de mots en tout genre, donc quand il a fallu que je me trouve un nom de scène, c’était évident pour moi de choisir un truc rigolo. (J’avais aussi pensé à Didier Snake, ou Vilaine Farmer notamment) mais DJ Schnake s’est imposé de lui-même. Bon en toute honnêteté, j’étais loin d’imaginer l’ampleur que ça allait prendre au moment de choisir mon blaze !
Mais au final je suis hyper fière de ce nom parce qu’il en dit long : être une fille qui s’appelle DJ Schnake dans un univers très boyz club, c’est se réapproprier les critiques qu’on peut émettre à l’encontre des femmes dans ce milieu (« gneugneu les filles qui ne savent pas mixer et qui percent parce que c’est des filles ») et faire preuve d’un second degré assumé qui envoie un message fort. Try me bitch !
Quel regard portes-tu sur la scène électro en France aujourd’hui, justement ton blaze fait référence à un très gros DJ commercial. On fait comment pour exister quand on est DJ Schnake et pas DJ Snake ?
A vrai dire j’espérais secrètement profiter de sa fame pour être bookée sur des événements par erreur !!!
Blague à part, je suis assez émerveillée par la pluralité de la scène electro actuelle ; il y a tellement de genres différents, de façons de faire la fête ou de consommer de la musique je trouve ça juste génial. Aussi, et désolée si je fâche les puristes, mais je trouve super que la musique puisse se mêler à d’autres disciplines créatives, le théâtre, la danse, la mode, le maquillage…je trouve que c’est la richesse de la scène électro actuelle, et notamment française.
Pour ce qui est d’exister « dans l’ombre » de DJ Snake, je pense que les chances d’être confondue avec sont assez minces, à moins de me mettre à porter des lunettes de soleil et de sold-out un stade de France en 20 minutes.
Tu as été révélée par La Darude : qu’est-ce qu’il a de spécial ce collectif ?
*getting emotional*
Pour moi la Darude, c’est la joie, cf : « Sentiment de bonheur, émotion agréable et profonde. ». Qu’on y aille pour la musique, les artistes, les gens qu’on va y croiser, pour y être soi-même, s’habiller comme on veut… C’est plus qu’un collectif pour moi, c’est vraiment le monde magique sous l’arc-en-ciel. Tout le monde sourit, tout le monde est sympa, c’est tellement différent de la majeure partie des soirées qui existent. Personnellement, je me suis révélée individuellement là-bas. Je me suis sentie à ma place, valorisée dans mon originalité. Et j’ai rencontré plein de gens originaux, à leur place aussi. C’est un cadre où toutes les originalités cohabitent ensemble en harmonie.
Musicalement aussi c’est spécial ; je trouve qu’il n’y a pas de jugement, et c’est la preuve que le second degré peut être sérieux, et le sérieux, accessible. On sort de l’entre soi puriste de la « techno » où il y a des règles improbables à respecter pour que de la musique soit considérée comme de la « bonne musique » ; à la Darude, la bonne musique, c’est celle qui nous plaît et qui nous apporte de la joie, tout simplement.
Comment tu définirais ta musique ? Quelles sont les choses qui t’influencent ? Comment sélectionnes-tu les tracks que tu joues ?
En trois mots, je dirai : accessible, éclectique et évidemment chipie ! Ma musique elle est sans prétention, mon but c’est vraiment de faire kiffer les gens, que ça leur parle, et de faire en sorte que ça leur apporte autant de bonheur qu’à moi ! Ce qui m’anime dans la musique que je joue c’est de pouvoir la partager. Et aussi un peu la bagarre.
Côté influence, la pop bien sûr, pour les paroles, le spectacle, le côté « hymne » repris par toustes – la musique classique/musiques de films, pour le mélange des sonorités, la capacité à susciter de l’émotion, les mélodies qui t’emmènent à un endroit où tu ne savais pas que t’avais envie d’aller avant d’y être. Et enfin je dirai le théâtre, l’idée qu’on puisse être qui on veut si on y croit assez fort, et surtout qu’on peut véhiculer les émotions qu’on veut en vivant et en incarnant la musique qu’on a choisi de jouer.
Pour sélectionner mes tracks, je me projette énormément en train de les jouer. J’imagine les gens devant moi, ce qu’ils vont attendre, comment la track que je vais mettre va à la fois remplir leurs attentes tout en les surprenant. C’est un exercice difficile ! Mais ça me permet d’essayer de faire les meilleurs choix possibles en fonction de ce qui peut être attendu de mon set.
On parle de « chipiecore » pour parler de toi… ça veut dire quoi ?
C’est parti pour EtymologiK by DJ Schnake !
Chipie, pour m’en tenir à la définition du dictionnaire : « jeune fille qui a un comportement désagréable, dédaigneux, capricieux ou prétentieux »
Core : suffixe pour désigner l’aspect « énervé » de la musique
En bref : la chipiecore, c’est le terme que j’ai inventé pour décrire la musique que je joue. Il y a une volonté de ma part de me réapproprier un terme péjoratif à l’encontre des femmes, et de m’en servir pour décrire la vibe de mon univers. Ma musique, elle est sexy, sûre d’elle, espiègle, elle nargue les gens vont dire des choses dessus, elle a un côté « tu critik mais tu clik », on s’en fout tant que ça fait kiffer les copaines. Et évidemment, c’est énervé, parce que j’aime les gros kicks et la bagarre. Ça résume ce que je pense de la féminité : il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon d’être une femme, et moi, je suis une tite chipie toute mimi qui aime lancer des grosses bastos ambiance descente du coude sur le dancefloor.
Tu peux teaser un peu ton set au Rex club ? À quoi faut-il s’attendre ?
Peu importe ce à quoi vous vous attendez, ça sera mieux, slay.
Depuis que je mixe c’est le set où je me sens la plus libre de faire ce que je veux, et de faire quelque chose de très propre à mon identité artistique pour 2024. Donc disons que ça sera du Schnake, mais pas forcément là où on m’attend. J’ai l’intention de faire quelque chose à mon image sauce 2024 ; new year, new me, new chipie.
Quels sont tes projets à venir ?
Et bien dans un premier temps la release de mon tout premier son ! Un remix de Je Veux Te Voir de Yelle en mode Chipiecore ! J’essaye vraiment de glow up en production, c’est une discipline qui me plaît énormément et je trouve que c’est la corde qui manque à mon arc pour être une artiste un peu plus complète. Je travaille en ce moment sur un potentiel premier ep, à voir !
Sinon, de jolies dates arrivent, à Paris, mais aussi à Rennes, Lille, Lyon… donc objectif « s’exporter » un peu pour sortir de ma zone de confort et de mon éco-système. Quelques festivals qui commencent à se programmer aussi ; j’aurai même la chance d’être curator d’une scène pour l’un d’entre eux, mais no spoil pour le moment ! Hâte de pouvoir révéler le line up que j’ai préparé… 2024 ça va être de la bombe !
Tu nous as concocté une playlist : tu nous la décris en 3 mots ?
Nostalgique, horny, et bien sûr : chipie !
Et si je te dis « Friction », tu penses à quoi ?
Je pense à deux entités distinctes qui entrent en collision, se frottent entre elles… Deux corps ? Deux tracks ? Les deux ?
Next gig : La Darude – le loft des cœurs brisés, 24/02/24 au Cabaret Sauvage