Il faut que je vous parle de l’été dernier.
J’étais tranquillement en train de laisser l’été glisser entre mes doigts quand un gars dont j’étais amoureux depuis longtemps, enfin l’un des gars dont je suis amoureux depuis longtemps, a fait à nouveau irruption dans ma vie. Enfin pas irruption, parce que j’ai un peu aidé le destin, mais vous voyez comment les choses arrivent, on donne un coup dans un domino et c’est l’armoire qui finit par tomber. C’est l’imparable théorie du chaos qui règne dans ma vie.
Par l’application de cette théorie, le gars en question me propose un weekend au bord de la mer, et c’est vrai que j’en avais besoin, on se morfondais dans la campagne à baisouiller sans trop d’ambition, il nous fallait de l’aventure, tu vois. Enfin l’aventure c’était la fête de la moule, dans cette cité balnéaire sur l’atlantique dont je tairais le nom mais qui a comme avantage de ne pas être trop chère.
Le gars (appelons-le T.), me rend fou : il est beau, mais il est constamment triste, comme si le soleil, les glaces, les cris d’enfants et les pipes appliquées le laissaient indifférent. Pourtant c’est un écorché vif, je veux dire, il est capable d’émotions, mais pas de sourire. Ils sont chiants ces gens, tu peux jamais rire aux éclats, et continuer, il faut toujours que ça se termine en larmes, en autodestruction, et tout ça. On finit toujours par couper les poils pubiens en 4.
Dans la pizzéria qui donne sur la plage, on se faisait des blagues légères, c’était serein. Les pizzas étaient cheap, le vin râpeux, mais c’était un bon moment. A la fin de ma 4 fromages, je fouille dans les poches de mon jean pour trouver de quoi payer, et je tombe sur un petit sachet contenant un comprimé orange fluo. Je lui montre avec un sourire. T. me demande d’où je tiens ce truc-là, il croit que je lui ai fait une surprise, mais je ne fais pas ce genre de surprise.
« Non non, ça date sans doute de la dernière fois, le dernier soir avant mon départ de Paris, avant les vacances, quand j’étais avec N. »
Bon, là, je sais que j’en ai trop dit, parce que je ne devais pas dire que j’étais avec N. Parce que N. et T. se connaissent, et que c’était pas hyper sympa de notre part d’avoir couché ensemble. T. était simplement pas censé le savoir, ça aurait arrangé les choses. Mais je sais que j’en ai trop dit, et T. est pas con, avec sa putain de tendance à dramatiser, il va tout de suite voir le problème.
Dans la foulée, quand je reviens de la caisse, que j’ai payé pour le vin et les pizzas, je sais qu’on vient de passer du côté obscur. T. a les yeux encore plus noirs que d’habitude. Je crois même qu’il y a quelques éclairs qui sortent de ses yeux. Et c’est comme ça que tout bascule. C’est comme ça que je comprends petit à petit qu’on atteint un point de non retour.
T’as déjà été avec un mec violent ? Moi je le découvre. Il hurle, il tape contre les murs, il ne me parle pas, il ne m’écoute pas, il est hostile, il est blessant. Dans la chambre d’hôtel, il ricane et il est effrayant. Il jouit de me voir le craindre, et il y a un masque qui tombe, un masque qui dévoile un visage que je n’oublierai jamais. On se sépare, il dort dans la voiture ou bien j’appelle les flics. Je ne dors pas de la nuit. Je pleure. Je me promets d’arrêter de l’aimer.
Je crois que je suis toujours en train d’essayer.
Twitter: @achillemtrl
*Ce titre a totalement été inspiré d’un morceau de Nana Benamer.