Samedi, on s’est baladées avec ma meuf au Salon du Livre Lesbien. Il n’y avait pas grand chose, on est donc reparties avec une hyperthermie et deux digues dentaires, proposées en libre service à l’entrée.
Aucune de nous deux n’avait jamais essayé cette protection contre les IST. On le sait, les bigouines se protègent peu ou mal et de nombreuses associations et collectifs (comme FièrEs par exemple) tentent d’améliorer leur degré d’information pour des pratiques plus sûres pour toutes.
En attendant, nous, on a testé la digue dentaire, protection la plus recommandée pour la pratique du cunnilingus. Immersion (ou pas).
Avant le test de la digue dentaire :
Ça se présente comme un grand carré de plastique, sous blister, décliné en 3 couleurs : noir, transparent et rose. A y regarder de plus près, celles ci sont en latex, mais il en existe aussi en polyuréthane. Plouf plouf, chacune choisit la sienne et on étudie soigneusement le mode d’emploi, rédigé en français, anglais et chinois, au dos de l’emballage, avec des illustrations sommaires.
Déjà, c’est en latex donc pas de lubrifiant au silicone, ça le rend poreux sinon. On apprend aussi qu’on ne peut pas l’utiliser pour la pénétration. Ça complique un peu le truc s’il faut être complètement équipées en mode apprenties dentistes pour baiser : digue dentaire + un gant pour la pénétration anale + un autre pour la vaginale. Mais on se laisse pas abattre. On se lave les mains, on sort le lubrifiant à l’eau. On ouvre.
Pendant le test de la digue dentaire :
Après avoir lubrifié le sexe de l’autre et/ou le côté de la digue qui sera collé à la muqueuse, on étale le champ en plastique à l’endroit indiqué. C’est assez grand (on peut la découper je pense), ça recouvre la vulve et l’intérieur des cuisses. Entièrement. Bon, visuellement c’est pas génial, l’idée d’un sac poubelle découpé (j’ai pris la noire car j’aime le risque) me vient de suite à l’esprit, me faisant redescendre direct de 4 degrés. Faut dire que ça sent aussi très fort le plastique, ça m’aide pas à chasser l’image. J’espère juste, à ce moment-là, ça n’en aura pas le goût (de sac poubelle).
Raté. Le gout du plastique est très fort, davantage qu’avec un préservatif classique. Et ça me pique la langue au bout de deux minutes, en mode irritation. De mon côté et au delà des désagréments sensoriels, c’est pas génial : j’ai l’impression que la chatte merveilleuse de ma meuf a disparu sous une bâche en plastique pour faire place à un truc désespérément plat et uniforme. Je ne sens ni les lèvres, ni le clitoris (ou à peine), la pénétration – même avec la langue – est, je le rappelle, déconseillée, impossible de jouer avec les plis et les replis, je suis privée de toute subtilité, condamnée à jouer seulement avec la pression de ma langue sur ce que je crois (espère) être son clito, le tout plongée dans cette odeur, ce goût et ce visuel de sac poubelle. De son côté à elle, elle ne sent pas grand chose mais la matière ne la pique pas, c’est toujours ça de pris. Autant dire qu’on n’a pas essayé bien longtemps et qu’on est revenues à ce qu’on sait faire de mieux, non sans avoir auparavant échangé les rôles pour comparer nos expériences de ce drôle de parachute. C’était pas mieux.
Après le test de la digue dentaire :
C’est peut être la marque mais le gout de plastique m’est resté sur la langue et les muqueuses quelques minutes, pour une expérience encore plus inoubliable au pays des hydrocarbures.
En conclusion, pour nous, la digue dentaire c’est non. Autant les gants en nitrile sont confortables, doux, pratiques et assez sexy (y en a des noirs à paillettes), autant il doit y avoir mieux pour le sexe oral safe. Finalement tout ce qu’on propose aux meufs pour la pratique du cunnilingus, c’est de se recouvrir la chatte d’une simple bâche en plastique. C’est à se demander si quelqu’un en ce bas monde s’intéresse suffisamment au plaisir et à la santé des femmes pour investir dans le développement de protections qui soient à la fois efficaces, pratiques et agréables. Ce désintérêt manifeste aurait-il un lien avec la place des femmes dans une société patriarcale ? On n’ose le croire (si).
Lecture conseillée :
- Paris ou la galère du dépistage
- Les potins lesbiens de Samantha Chatte