Trois questions à Pierre, créateur du podcast « Les indociles »

Emily Tante n’est pas qu’une drag queen : c’est aussi Pierre Jouquan, jeune diplômé, qui vient de créer Les indociles, un podcast dédié aux militantes et militants d’aujourd’hui.

Est-ce que tu peux nous dire comment tu as eu l’idée de créer Les indociles ?

Je viens de finir mes études de communication politique et publique et j’ai eu une matière qui m’a particulièrement intéressé, celle de l’innovation civique et démocratique. Dans cette matière on étudie comment on peut changer les choses, quelles sont les innovations politiques, les innovations d’organisation et aussi d’activisme.

Or, on se retrouve dans une période où le Covid-19 a restreint nos moyens de manifester. J’ai aussi des ami·e·s qui ont peur d’aller manifester suite à la visibilité des violences policières sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, j’ai des copines qui se sont lancées dans le collage féministe. Il y a l’émergence de la figure de Greta Thunberg, les posts Instagram à la Nous Toutes avec un chiffres clefs et une information forte, etc. Tous ces éléments m’ont permis de voir qu’une nouvelle générations, plus ou moins âgée, et de nouvelles manières de faire, étaient apparues. Ça m’a donné envie de faire parler ces personnes.

Ce sont souvent des personnes jeunes, des femmes, ou des personnes LGBTQIA que l’on entend pas ou peu dans les médias traditionnels pour parler de ces sujets et pourtant ce sont celleux qui font bouger les lignes.

Tu as interviewé des drag queens qui militent contre le SIDA, le BAAM, une colleuse féministe, un militant écolo : à part que ce sont des militant·e·s, c’est quoi le point commun entre tous ces gens ? Est-ce qu’il y a un truc qui les relie ?

Ce sont la manière dont ils et elles conçoivent la lutte. Ils et elles sont dans un esprit d’intersectionnalité et ne pensent plus la lutte en silo.

Je prends l’exemple d’Enzo 17 ans, écolo : dans Les indociles, il nous parle de droits humains, tout en nous disant les conséquences de la fast fashion sur l’écologie. Il implique à la fois la question des milieux urbains et des milieux ruraux dans sa réflexion. Il lie la question des femmes et de l’emploi à l’écologie. 

La deuxième chose qui les relie toutes et tous, c’est qu’ils ne sont pas né·e·s militant·e·s, bien que certains et certaines ont grandi dans un noyau familial déjà militant. Ils et elles sont, comme beaucoup, passé·e·s par une rupture avec les valeurs défendues par le gouvernement, ou l’État, avant d’entamer un cheminement de questions (le fameux « pourquoi » d’Héloïse du BAAM). Et puis au moment où la colère est passée ou grandissante, il y a la question de comment je participe, et avec qui ou sur quoi. C’est très intéressant de voir leurs parcours : si différents et similaires à la fois.

Le climat actuel est peu propice à l’organisation militante : la pandémie rend les réunions difficiles, la répression des mouvements sociaux est une réalité… Comment vois-tu le militantisme évoluer en 2021 ?

Plus j’évolue dans ce climat, plus je m’interroge. Chaque choix que l’on fait peut être militant.

Dans un prochain épisode je reçois Levent qui nous rappelle l’utilité du boycott en collectif : là c’est l’exemple du choix par le porte-monnaie, mais on peut aussi décider que militer c’est arrêter de se servir des outils des GAFAMS ou alors de réduire leur nocivité sur notre esprit et notre monde en installant des plugs-ins. On peut retourner dans la rue crier et marcher mais on peut aussi se dire que demain la lutte reviendra sur internet avec un nouveau collectif de hackers. On peut aussi hacker la rue en plantant dans les fissures du béton comme le fait déjà pas mal de collectifs. Je pense aussi aux formations de Nous Toutes, qu’elles font en visioconférence. 

En fait, on va continuer à explorer le militantisme en inventant encore pleins de nouvelles manières. Et on va trouver pleins de moyens de faire collectif. Parce que ce qui marche le plus c’est le collectif. Et puis bon, peut-être qu’on retournera un jour danser en signe de protestation !

Les indociles, un podcast de Pierre Jouquan
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